Le billet de vingt marks
Adapté d’un discours donné le 12 mars 2002 lors d’une réunion spirituelle à l’Université Brigham Young–Idaho. L’intégralité du discours en anglais se trouve à l’adresse Internet suivante : www.byui.edu/Presentations/Transcripts/Devotionals/2002_03_12_Packer.htm.
Il y a plus de trente ans on m’a demandé d’aller avec Thomas S. Monson organiser un pieu de militaires en Europe. La réunion a eu lieu à Berchtesgaden (Allemagne), sur les hauteurs des Alpes bavaroises. À l’origine, c’était le quartier général construit par Adolf Hitler dans un endroit d’une incomparable beauté. Il y a rarement eu sur terre une personne qui ait autant ressemblé à l’adversaire qu’Adolf Hitler tant sur au plan de la personnalité qu’à celui de la motivation. Je me suis dit qu’il s’était produit un revirement complet à l’endroit où nous étions car nous étions maintenant rassemblés pour organiser un pieu de Sion.
Après avoir terminé de faire les mises à part et l’organisation du pieu, nous avons été envoyés à Berlin pour une conférence de pieu. Il fallait que nous allions de Berchtesgaden, perchée en haut des Alpes, à l’aéroport de Munich.
Nous sommes arrivés à l’aéroport bien avant le départ de notre avion prévu vers dix heures du matin, mais il y avait du brouillard. Nous sommes restés assis à écouter les annonces pendant près de douze heures. Ils continuaient à dire qu’ils pensaient que le brouillard allait se lever. Mais il ne se levait pas.
Le soir venu, vers vingt-deux heures, deux missionnaires sont arrivés à l’aéroport. Nous avons su alors que l’avion ne décollerait pas. Ils nous ont dit qu’il y avait un train qui partait de Munich pour Berlin à minuit. Ils nous ont conduits à la gare, nous ont aidés à acheter nos billets et nous ont accompagnés jusqu’au train qui devait partir vers minuit pour arriver aux environs de dix heures le lendemain matin à Berlin.
Quand le train a démarré, un des jeunes missionnaires a demandé : « Est-ce que vous avez de l’argent allemand ? »
J’ai fait non de la tête.
Il a dit : « Il vaut mieux en avoir » et, courant le long du quai, a sorti un billet de vingt marks de sa poche. Il me l’a tendu.
En ce temps-là, le rideau de fer était vraiment de « fer ». Le train s’est arrêté à Hof à la frontière entre l’Allemagne de l’Ouest et l’Allemagne de l’Est et l’on a changé de personnel de bord. Toute l’équipe d’Allemagne de l’Ouest est descendue du train et le personnel est-allemand est monté. Puis le train a repris sa route à travers l’Allemagne de l’Est en direction de Berlin.
Le gouvernement américain venait tout juste de commencer à délivrer des passeports valides pour cinq ans. J’avais un de ces nouveaux passeports, valide pour cinq ans. Avant notre voyage, nous étions allés faire une demande de renouvellement du passeport de ma femme mais on nous l’avait renvoyé en nous disant que les passeports ayant une validité de trois ans étaient considérés comme des passeports ayant une validité de cinq ans. Il lui restait encore plus de deux ans de validité sur son passeport.
Vers deux heures du matin, un contrôleur, du genre militaire, est venu nous demander nos billets puis, ayant remarqué que nous n’étions pas allemands, a demandé nos passeports. Je n’aime pas remettre mon passeport, particulièrement dans un lieu inhospitalier. Mais il les a pris. Je n’éprouve quasiment jamais d’antipathie pour quelqu’un mais j’ai fait une exception pour lui ! C’était quelqu’un de revêche, renfrogné, patibulaire.
Nous ne parlions pas allemand. Il y avait six personnes dans le compartiment : ma femme, un Allemand assis à côté d’elle et, en face de nous, quasiment genoux contre genoux, trois autres Allemands. Nous avions bavardé tous ensemble un petit peu. Quand le contrô-leur est entré, tout le monde s’est tu.
Il a dit quelque chose et j’ai su ce qu’il disait. Il n’acceptait pas le passeport de ma femme. Il est parti et est revenu deux ou trois fois.
Finalement, ne sachant pas quoi faire, j’ai eu une lueur d’inspiration et j’ai tendu le billet de vingt marks. Il l’a regardé, l’a pris et nous a rendu nos passeports.
Le lendemain matin, quand nous sommes arrivés à Berlin, un membre de l’Église nous a accueillis au train. Je lui ai raconté notre expérience d’un ton assez léger. Il est devenu soudain très sombre. J’ai demandé : « Que se passe-t-il ? »
Il a répondu : « Je ne sais pas comment vous avez fait pour arriver jusqu’ici. L’Allemagne de l’Est est actuellement le seul pays au monde qui refuse de reconnaître les passeports de trois ans. Pour eux, le passeport de votre femme n’est pas valide. »
J’ai demandé : « Bon, et qu’est-ce qu’ils auraient pu faire ? »
Il a repondu : « Vous faire descendre du train. »
J’ai dit : « Ils ne nous auraient quand même pas fait descendre ? »
Il a répondu : « Pas nous. Elle ! »
J’imaginais quelqu’un faisant descendre ma femme du train vers deux heures du matin quelque part en Allemagne de l’Est. Je ne sais pas comment j’aurais réagi. Ce n’est que plus tard que j’ai découvert à quel point c’était dangereux et quelle était la situation, particulièrement pour ma femme. Je me soucie d’elle beaucoup plus que de moi-même. Nous avions couru un très grand danger. Les gens qui n’avaient pas de passeport en règle étaient arrêtés et mis en prison.
Notre vie est guidée
Tout cela pour en arriver à ceci : le missionnaire qui m’a tendu le billet de vingt marks était David A. Bednar, jeune ancien qui était dans la mission du Sud de l’Allemagne et qui fait maintenant partie du Collège des douze apôtres.
Alors comment se fait-il que ce jeune missionnaire originaire de San Leandro (Californie) m’ait tendu un billet de vingt marks ? Si vous comprenez cela et si vous comprenez le but de la vie, vous aurez compris vraiment tout ce que vous devez savoir sur ce que signifie être membre de l’Église. Vous aurez compris que notre vie ne nous appartient pas vraiment. Elle est gouvernée et si nous vivons comme nous le devons, alors on prendra soin de nous. Je ne pense pas qu’il se rendait compte des conséquences de son geste. Ce billet de vingt marks valait six dollars et six dollars, pour un missionnaire, c’est une somme !
Au cours de votre vie, vous découvrirez que ces choses arrivent quand vous vivez comme vous devez le faire.
Si vous pouvez apprendre ce qu’est l’Esprit, alors vous ne serez jamais seul. Dans Doctrine et Alliances 46:2, on lit : « Mais en dépit des choses qui ont été écrites, il a toujours été donné aux anciens de mon Église, depuis le commencement, et ce le sera toujours, de diriger toutes les réunions selon les inspirations et les directives de l’Esprit-Saint. »
Votre corps d’esprit
La doctrine expliquée dans les Écritures et les révélations, nous apprend qu’il y a deux composantes à notre être. Nous savons qu’il y a un esprit et un corps. « L’esprit et le corps [quand ils seront réunis pour l’éternité deviendront] l’âme de l’homme » (D&A 88:15). Vous êtes donc composés de deux parties. Un esprit habite votre corps.
Vous avez un corps d’esprit ; votre intelligence a toujours existé (voir D&A 93:29). Cela vous est difficile à comprendre. Nous allons vivre pour toujours. Vous le croyez, n’est-ce pas ? À la résurrection nous vivrons éternellement. Cela ne se peut que si c’est également vrai pour le passé, c’est-à-dire que nous ayons vécu éternellement dans le passé. Ici, nous sommes au milieu de quelque chose d’éternel.
J’ai songé au jour où mon esprit quittera mon corps. Quand ce « détachement » aura lieu, que votre corps sera mis de côté, à quoi ressemblerez-vous ? À quoi ressemblera votre esprit ?
On pourrait décrire certains d’entre vous comme des athlètes parfaits – parfaitement coordonnés et capables de tout faire ! Vous possédez un corps physique magnifique. Si l’on séparait votre corps de votre esprit, à quoi ressemblerait votre esprit ? Vous apprendrez, si vous étudiez, si vous priez et écoutez, qu’il est possible d’avoir un beau corps et un esprit ratatiné et faible. D’un autre côté, vous pouvez avoir un corps limité de bien des façons, mais, dans la perspective éternelle des choses, vous pouvez façonner et instruire votre esprit pour qu’il devienne d’une valeur impérissable.
Réjouissez-vous dans l’attente du jour où vous serez « détaché » et où votre esprit sera séparé de votre corps. Votre esprit est jeune, plein de vie et magnifique. Même si votre corps est vieux et atteint d’une quelconque maladie ou infirmité, quand l’esprit et le corps seront réunis à la résurrection, vous serez glorieux ; vous serez glorifiés.
J’ai connu un homme, un des grands hommes qu’il m’a été donné de connaître, qui faisait partie d’un groupe de mauvais garçons. Ils étaient toujours là où ils ne devaient pas être et jamais là où ils auraient dû se trouver. Finalement, un dirigeant qui avait de la sagesse et de l’habileté a réussit à les faire venir à un cours de l’École du dimanche. L’instructeur était un vieil homme – ordinaire et simple. Plus encore, c’était un converti venu d’Europe et il ne parlait pas très bien anglais. Ils ont ricané : « Lui ? Notre instructeur ? » J’imagine que ces garçons avaient la réputation de venir à bout de n’importe quel instructeur.
C’est alors, a dit mon ami, que quelque chose s’est produit. L’instructeur a commencé à parler et ils se sont tous mis à écouter. Cet ami a dit : « On pouvait se réchauffer les mains à la flamme de sa foi. » Cela signifiait que dans ce vieux corps usé qui semblait être incapable d’effacer un accent, il y avait un esprit puissant.
À la résurrection, le corps, la poussière de la terre, la partie charnelle de notre personne, peut être renouvelé et rendu puissant au point d’égaler l’esprit.
Le Saint-Esprit vous guidera
Si vous arrivez à comprendre comment opère l’Esprit, tout ira bien pour vous. Il n’est pas possible de rassembler assez de mal – même si on le concentrait entièrement dans une sorte d’hideux faisceau laser de ténèbres et qu’on le dirige sur vous, cela ne pourrait pas vous détruire, à moins que vous y consentiez d’une manière ou d’une autre.
Dans votre apprentissage, le commencement de la sagesse consiste à acquérir la sagesse et, avec tout ce que vous possèdez, à acquérir l’intelligence » (voir Proverbes 4:7).
Veillez à apprendre les choses que l’on ne vous enseigne pas ouvertement. Si tout ce que vous savez vient de ce que vous lisez ou entendez, vous ne saurez pas grand chose. Les instants de recueillement pendant lesquels on réfléchit et on ressent sont très précieux. C’est pour cela que les temples sont si importants. On peut se rendre au temple et être hors du monde.
La promesse du Seigneur est que, lorsque vous recevrez le Saint Esprit, il vous enseignera toutes choses, et vous rappellera tout ce que le Seigneur vous a dit (voir Jean 14:26).
Il y a des choses que vous ferez automatiquement, presque inconsciemment. Vous verrez que, sans vous en rendre compte, vous avez été inspirés et guidés par le Saint Esprit. C’est pour cette raison que ce jeune missionnaire, sans savoir pourquoi, a sorti un billet de vingt marks de son portefeuille pendant qu’il courait le long du train et me l’a tendu au moment du départ. Il nous a sauvés d’un grand danger.
C’est ainsi que vous ferez des choses qui, lorsque vous y repenserez plus tard, vous indiqueront que vous étiez guidés. C’est aussi comme cela que vous serez mis en garde. Vous recevrez l’avertissement : « N’allez pas là-bas ! Ne faites pas cela ! » Vous recevrez l’avertissement : « Ne vas pas avec lui ! Ne vas pas avec elle ! Ne vas pas avec eux ! » Ainsi que : « Reste dans ce groupe ! » Vous serez guidés et le Seigneur veillera sur vous.
Je sais que l’Évangile est vrai, que Jésus est le Christ, qu’il vit, que cette Église est la sienne. Trouvez un endroit dans le monde où vous pouvez, sans gêne, sans hésitation vous faire la déclaration suivante : premièrement, que vous acceptez l’Évangile de Jésus-Christ et, deuxièmement, que vous êtes plus important que ce que vous faites. Ce que vous faites, si c’est sous l’inspiration, fera de vous ce que vous êtes et ce que vous pouvez être.