Le pouvoir de la maîtrise de soi
La maîtrise de soi est la marque suprême de la force de caractère.
Mes frères, ce soir nous vivons un moment historique. Nous sommes rassemblés dans ce qui est la plus grande réunion de la prêtrise jamais tenue en quelque dispensation que ce soit. Nous sommes heureux que des centaines de milliers de frères, outre ceux qui sont dans ce magnifique centre de conférence, y assistent. Cette première réunion dans ce splendide édifice flambant neuf est un grand moment de l’histoire de l’humanité. Nous en sommes redevables au Seigneur qui a inspiré le président Hinckley, lui donnant la vision prophétique qui a conduit à cette construction et l’a rendue possible. Nous remercions H. David Burton, Richard C. Edgley, Keith B. McMullin, de l’Épiscopat président, et tous ceux qui ont participé à sa construction. Maintenant que nous l’avons, nous devons l’utiliser pour renforcer la foi des membres.
Ce soir, mes frères, j’aimerais parler du pouvoir de la maîtrise de soi au sens large. La maîtrise de soi est indispensable pour invoquer le pouvoir de la prêtrise de Dieu. La raison en est que ce grand pouvoir divin de la prêtrise ne peut s’exercer que dans la justice. La maîtrise de soi implique l’autodétermination et la force de caractère. Elle accroît nos dons et nos talents d’une manière remarquable. C’est le pouvoir d’une noble virilité.
Chaque être humain, et en particulier tout détenteur de la prêtrise, a la tâche de maîtriser ses pensées, ses appétits, ses paroles, son caractère et ses désirs. Par exemple, on peut avoir mauvais caractère. Quand j’étais jeune, j’étais roux. Parfois, ma mère m’accusait d’avoir mauvais caractère ce qui allait de pair avec mes cheveux. Les gens m’appelaient «le rouquin». C’était une déclaration de guerre. Je crois avoir appris à me maîtriser. Les roux ne sont pas les seuls à devoir apprendre à maîtriser un caractère indiscipliné. La volonté est nécessaire si nous ne voulons pas que l’irritation domine nos émotions.
Récemment, un journal rapportait un phénomène qui s’est développé en même temps que la circulation sur nos routes: «C’est le scénario habituel de l’heure de pointe: coups de klaxons, pare-chocs contre pare-chocs, gestes obscènes. Même la violence directe est en augmentation sur nos routes.» Parfois la colère nous fait perdre tout contrôle; on appelle cela la «rage du conducteur». Je me suis souvent demandé comment il se faisait que la personnalité de certains hommes changeait aussitôt qu’ils se trouvaient derrière le volant de leur voiture, en sécurité derrière le verre et le métal. Il semble que cela doive excuser leur comportement mal élevé. La «rage du conducteur» n’est pas causée par les embouteillages mais c’est une question d’attitude. En s’impatientant et en devenant très agressifs, certains conducteurs peuvent perdre le contrôle et causer des blessures graves et même la mort de ceux qui sont sur la route.
La maîtrise de soi est difficile pour tous. Nous sommes les seuls à pouvoir contrôler nos appétits et nos passions. La maîtrise de soi ne peut s’acheter à prix d’argent ni s’obtenir par la célébrité. C’est la mesure suprême de notre personnalité. Elle exige que nous quittions les profondes vallées de notre vie pour escalader notre propre mont Everest.
Quand nous sommes missionnaires à plein temps, nous apprenons de grandes leçons de maîtrise de soi. Nous apprenons à nous lever quand il faut, à travailler quand il faut, et à nous coucher quand il faut. En général, les gens admirent, voire respectent nos missionnaires même si leur message n’est pas aussi bien reçu que nous le voudrions. La Première Présidence et d’autres Autorités générales rencontrent souvent des chefs d’État, des ambassadeurs et des ministres du monde entier. Souvent, quant le sujet s’y prête, ces hommes puissants et influents parlent avec admiration et respect des missionnaires qu’ils ont vus dans leur pays.
Nos jeunes frères missionnaires sont des jeunes gens exemplaires. Lorsqu’ils rentrent chez eux, certains sont accusés de pharisaïsme parce qu’ils s’habillent décemment et conservent des cheveux courts et propres. Je ne peux comprendre pourquoi on accuse de pharisaïsme un ancien missionnaire parce qu’il essaye de suivre les règles et les principes qu’il a lui-même enseignés, en tant que représentant du Seigneur, aux habitants du pays où il a servi. Bien sûr, on ne demande pas aux anciens missionnaires de porter une chemise blanche et une cravate tout le temps. Mais porter des vêtements débraillés et une coupe de cheveux bizarre, soit disant pour être à la mode, n’est pas digne de quelqu’un qui détient la prêtrise de Dieu. Les anciens missionnaires doivent être un exemple pour les jeunes de la Prêtrise d’Aaron qui seront nos futurs missionnaires. Souvent, ce que les jeunes de la Prêtrise d’Aaron voient est plus convainquant que ce qu’on leur dit.
Les gens cherchent souvent à être remarqués et à recevoir l’approbation du groupe auquel ils veulent appartenir. Cette pression du groupe peut les amener à faire des choses qu’ils ne feraient pas autrement. C’est un signe de faiblesse, pas de force. Le Seigneur nous promet, par l’intermédiaire de Moroni: «Et si les hommes viennent à moi, je leur montrerai leur faiblesse. Je donne aux hommes de la faiblesse afin qu’ils soient humbles; et ma grâce suffit à tous les hommes qui s’humilient devant moi, et ont foi en moi, alors je rendrai fortes pour eux les choses qui sont faibles.»
En termes simples, la maîtrise de soi consiste à faire ce que nous devons et à ne pas faire ce que nous ne devons pas. Elle exige de la force, de la volonté et de l’honnêteté. Tandis que la circulation sur l’autoroute de l’information s’engorge, nous devons faire de plus en plus appel à notre capacité de distinguer le bien du mal. Aussi merveilleux que cela soit à de nombreux égards, on peut se laisser hypnotiser par l’usage de l’Internet. En cela, je fais référence aux communications interactives sans fin et à la connexion sur des sites pornographiques.
Je vais maintenant parler de la maîtrise de nos propres pensées. Dans ce domaine, notre conscience est le seul arbitre qui puisse siffler lorsque nous perdons le contrôle. Si nous ne bridons pas nos pensées, elles peuvent devenir anarchiques. Notre esprit est une partie de nous-mêmes qui requiert d’être discipliné et contrôlé. Je crois que la lecture des Écritures est le meilleur moyen de se débarrasser de pensées impures et incontrôlées. Pour ceux qui en sont dignes, la sainteté du temple peut élever les pensées au-dessus des réalités terrestres.
A l’époque où je faisais du sport et faisais mon service militaire, j’ai entendu des expressions qui me faisaient honte rien que de les entendre. Si, comme l’a suggéré Samuel Johnson, «le langage est le vêtement de la pensée», alors le langage que nous entendons à la télévision, dans les films et même à l’école, est la pauvre illustration du niveau de la pensée d’aujourd’hui. Je me fais du souci pour nos jeunes, craignant qu’ils deviennent insensibles à force d’entendre ou d’utiliser ce langage. Je crois qu’un jeune homme de caractère ne doit pas utiliser un langage grossier. Un détenteur de la prêtrise de Dieu ne devrait jamais utiliser de langage vulgaire ni avoir de gestes obscènes.
Je vais maintenant parler de l’absolue nécessité de maîtriser tous les appétits physiques. On pourrait les appeler «l’écharde dans notre chair». Harry Emerson Fosdick a donné un important contexte à la maîtrise de soi: «L’abnégation ne doit pas être considérée comme une chose négative qui nous interdirait ce qui nous attire. En un sens, l’abnégation n’existe pas car c’est uniquement le prix à payer pour ce à quoi nous aspirons.»
L’un des grands fondements de la puissance personnelle est la pureté. Lord Tennyson l’a bien illustré lorsqu’il a écrit: «J’ai la force de dix hommes, parce que mon cœur est pur.» De tout mon cœur, je vous conjure, chers jeunes gens, de ne pas emporter avec vous quelque honte secrète jusque dans le mariage. Vous pourriez ne jamais réussir à l’oublier. Il vous faut traverser la vie avec la force que procure une conscience pure qui vous permettra un jour de vous tenir devant votre créateur et de dire: «Mon âme est pure.» L’abnégation n’est pas une limitation. C’est une libération. C’est le chemin de la liberté. C’est une force. C’est un des éléments essentiels de la pureté. Shakespeare l’a dit de manière excellente par la bouche d’Hamlet:
Ce soir, abstenez-vous,
Heber J. Grant a été le premier président de l’Église que j’ai eu l’honneur de rencontrer. C’était vraiment un grand homme. Nous l’admirions car une grande partie de sa force lui venait de sa détermination à être maître de lui. Son père est mort alors qu’il n’avait qu’un an et sa mère, restée veuve, a du lutter pour l’élever. Il l’aidait consciencieusement et essayait de s’occuper d’elle.
Lorsque, un peu plus âgé, il a voulu faire partie d’une équipe de base-ball, les autres garçons se sont moqués de lui, le traitant de poule mouillée parce qu’il ne réussissait pas à envoyer la balle d’une base à l’autre. Ils se sont tant moqués de lui qu’il a décidé qu’il jouerait avec l’équipe championne du Territoire de l’Utah. Il a acheté une balle de base-ball et s’est entraîné pendant des heures, lançant la balle contre la vieille grange du voisin. Souvent, son bras était si douloureux qu’il avait du mal à dormir. Mais il a continué à s’entraîner à s’améliorer et à monter d’une équipe à l’autre, jusqu’à réussir à jouer dans l’équipe qui a remporté le championnat du Territoire.
Un autre exemple de sa maîtrise était sa détermination à savoir bien calligraphier. Son écriture était si mauvaise que l’un de ses amis en avait dit, «on dirait des pattes de mouche». «Non», avait répondu un autre, «c’est la foudre qui est tombée dans l’encrier». Ceci, bien sûr, a piqué au vif le jeune Heber Grant. Alors qu’il était encore adolescent et qu’il travaillait dans les bureaux de H. R. Mann & Cie, on lui a proposé trois fois ce qu’il gagnait s’il allait à San Francisco comme secrétaire. Plus tard, il a enseigné la calligraphie et la comptabilité à l’université d’Utah. De fait, grâce à une page d’écriture qu’il avait faite à l’âge de dix-sept ans, il a remporté le premier prix de calligraphie à la foire territoriale devant quatre secrétaires professionnels.
Le chant aussi présentait des difficultés pour le président Grant. Dans son enfance il chantait faux. Lorsqu’il a eu dix ans, un professeur de musique a tenté de lui enseigner une chanson toute simple mais a du y renoncer, désespéré. A vingt-six ans, quand il est devenu apôtre, il a demandé au professeur Sims de lui enseigner à chanter. Après l’avoir écouté, le professeur lui a dit: «Oui, vous pouvez apprendre à chanter, mais je préférerais me trouver à cinquante kilomètres quand vous le ferez.» Cela n’a fait que renforcer sa détermination de mieux faire.
Un jour, le président Grant a déclaré: «J’ai répété un cantique de seulement quatre lignes entre trois cents et quatre cents fois, et je n’arrive toujours pas à le chanter.» On raconte que pendant un voyage en Arizona avec frères Rudger Clawson et J. Golden Kimball, frère Grant «a demandé si, en chemin, il pouvait leur chanter une centaine de cantiques. Ils pensaient qu’il plaisantait et ont répondu: ‹Bien sûr, allez-y.› Au bout de quarante, ils lui ont déclaré que s’il chantait les soixante restant, ils feraient tous les deux une dépression nerveuse. Il a chanté les soixante restant.»
En continuant à s’exercer tout au long de sa vie il a amélioré son chant mais peut-être pas autant qu’il avait développé ses talents de joueur de base-ball ou de calligraphe, où il était passé maître. La citation préférée du président Grant était une phrase de Ralph Waldo Emerson dont il a fait sa devise: «Ce que nous persistons à faire devient plus facile, non pas que la nature de la chose change, mais notre capacité de la faire grandit.»
Nous, détenteurs de la prêtrise, nous ne devrions pas nous chercher d’excuses lorsque nous perdons notre maîtrise. Même si notre situation est difficile, nous pouvons tous nous efforcer de nous maîtriser. Nous en tirerons de grandes satisfactions personnelles. La maîtrise de soi dépend de la spiritualité qui est notre quête essentielle dans la condition mortelle. Comme le président McKay l’a un jour déclaré: «La spiritualité est la conscience de la victoire sur soi et de la communion avec l’infini. La spiritualité nous pousse à vaincre les difficultés et à acquérir toujours davantage de force. Sentir nos facultés s’éveiller et la vérité épanouir notre âme est l’une des expériences les plus belles de l’existence.» William Ernest Henley, bien qu’infirme, a su triompher courageusement, en son cœur et en son esprit, de sa condition physique lorsqu’il a écrit son poème «Invictus»:
Dans la nuit qui m’environne,
Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Je loue les dieux qui me donnent
Une âme qui est noble et fière.
Prisonnier de ma situation,
Je ne veux pas me rebeller:
Meurtri par les tribulations,
Je suis debout, bien que blessé.
Aussi étroit que soit le chemin,
Bien qu’on m’accuse et qu’on me blâme:
Je suis maître de mon destin;
Mes frères, je témoigne de tout mon cœur et de toute mon âme que par le pouvoir de la maîtrise de soi nous pourrons hériter des bénédictions que notre Père céleste réserve à ses fils fidèles. Au nom de Jésus-Christ. Amen.