2010-2019
Voilà ta mère
Octobre 2015


16:43

Voilà ta mère

Dans la condition mortelle, aucun amour ne s’apparente davantage à l’amour pur de Jésus-Christ que l’amour désintéressé d’une mère dévouée pour son enfant.

Je me joins à vous pour souhaiter la bienvenue à Ronald A. Rasband, Gary E. Stevenson et Dale G. Renlund et à leurs femmes dans l’association la plus douce qu’ils puissent imaginer.

Prophétisant au sujet de l’expiation du Sauveur, Ésaïe a écrit : « Ce sont nos souffrances qu’il a portées, C’est de nos douleurs qu’il s’est chargé. » Une vision majestueuse des derniers jours souligne que « [Jésus] est venu dans le monde […] [afin] de porter les péchés du monde ». Les Écritures anciennes et modernes témoignent qu’il « les a lui-même rachetés, […] il les a soutenus et portés, aux anciens jours ». Un cantique bien connu nous supplie d’écouter la voix de notre grand Libérateur [littéralement, celui qui nous délivre, NdT].

Porter, porté, se charger, délivrer. Ce sont des mots messianiques puissants et encourageants. Ils parlent d’aide et d’espoir en une progression sans risque de l’endroit où nous sommes à celui où nous avons besoin d’être, mais que nous ne pouvons atteindre sans assistance. Ils ont aussi une connotation de fardeau, d’effort et d’épuisement, et sont tout à fait adéquats pour décrire la mission de celui qui, à un prix indescriptible, nous relève quand nous sommes tombés, nous porte quand nous n’avons plus de force, nous ramène au foyer sains et saufs quand la sécurité semble absolument hors d’atteinte. Il a dit : « Mon Père m’a envoyé pour que je sois élevé sur la croix ; […] afin que, comme j’ai été élevé […], de même les hommes soient élevés […], [jusqu’à] moi. »

Mais ces mots évoquent-ils pour vous un autre champ d’action humain dans lequel nous utilisons des mots tels que porter, travail et délivrance ? Comme il l’a dit à Jean alors même qu’il accomplissait l’Expiation, Jésus nous dit, à nous tous aussi : « Voilà ta mère. »

Aujourd’hui, je déclare du haut de cette chaire ce qui a été dit ici précédemment : que dans la condition mortelle, aucun amour ne s’apparente davantage à l’amour pur de Jésus-Christ que l’amour désintéressé d’une mère dévouée pour son enfant. Quand Ésaïe, dans des paroles messianiques, a voulu communiquer l’idée de l’amour de Jéhovah, il a utilisé l’image du dévouement d’une mère. « Une femme oublie-t-elle l’enfant qu’elle allaite ? », demande-t-il. Complètement absurde, sous-entend-il, mais pas autant que de penser que le Christ nous oubliera jamais.

Cette sorte d’amour résolu « est patiente, et est pleine de bonté, […] ne cherche pas son intérêt, […] mais […] excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout ». Plus encourageant que toute autre chose, ce genre de fidélité « ne périt jamais ». « Quand les montagnes s’éloigneraient, quand les collines chancelleraient, a dit Jéhovah, mon amour ne s’éloignera point de toi. » C’est aussi ce que disent nos mères.

C’est que non seulement elles nous portent, mais elles continuent de nous supporter. Ce qui fait de la maternité une prouesse aussi incroyable, ce n’est pas seulement le fait de porter un enfant avant sa naissance, mais de le porter toute la vie durant. Bien sûr, il y a des exceptions tragiques, mais la plupart des mères savent de manière intuitive et instinctive qu’il s’agit d’une responsabilité suprême et sacrée. Le poids de cette prise de conscience, en particulier sur de jeunes épaules maternelles, peut être très intimidant.

Une jeune mère formidable m’a écrit récemment : « Comment se fait-il qu’un être humain puisse aimer un enfant si profondément qu’il renonce de plein gré à une grande partie de sa liberté pour lui ? Comment l’amour mortel peut-il être si fort que l’on se soumette volontairement à la responsabilité, à la vulnérabilité, à l’anxiété et au chagrin et que l’on y revienne toujours pour en ressentir davantage ? Quel genre d’amour mortel peut vous faire sentir, une fois que vous avez un enfant, que votre vie ne sera plus jamais la vôtre ? L’amour maternel doit être divin. Il n’y a pas d’autre explication. Ce que font les mères est un élément essentiel de l’œuvre du Christ. De le savoir devrait suffire pour nous faire dire que l’impact d’un tel amour se situera entre insupportable et transcendant, encore et encore, jusqu’à ce que, le tout dernier enfant sur terre étant en sécurité et sauvé, nous puissions [alors] dire, avec Jésus, ‘[Père,] j’ai achevé l’œuvre que tu m’as donnée à faire’. »

Pendant que l’élégance de cette lettre résonne dans notre esprit, je vais vous faire part de trois expériences qui reflètent l’influence majestueuse des mères, et dont j’ai été témoin dans mon ministère au cours des quelques semaines passées.

La première expérience constitue une mise en garde, qui nous rappelle que tous les efforts maternels n’ont pas une issue heureuse, du moins pas immédiatement. J’en ai pris conscience suite à une conversation avec un homme dont je suis l’ami depuis plus de cinquante ans, qui se mourait, éloigné de l’Église qu’il savait, dans son for intérieur, être vraie. Malgré tous mes efforts pour le consoler, je n’arrivais pas à lui apporter la paix. À la fin, il m’a parlé franchement. Il a dit : « Jeff, aussi douloureux que cela puisse être de paraître devant Dieu, je ne peux pas supporter l’idée de paraître devant ma mère. L’Évangile et ses enfants, c’était tout ce qui comptait pour elle. Je sais que je lui ai brisé le cœur, et cela brise le mien. »

En ce qui me concerne, je suis absolument certain que, quand il est décédé, sa mère a reçu mon ami les bras grand ouverts, avec amour ; c’est ainsi qu’agissent les parents. Mais la mise en garde que contient cette histoire est que les enfants peuvent briser le cœur de leur mère. Là encore, nous voyons une autre comparaison avec le divin. Je n’ai pas besoin de rappeler que Jésus est mort le cœur brisé, usé d’avoir porté les péchés du monde. C’est pourquoi, puissions-nous, dans tous les moments de tentation, penser à notre mère et à notre Sauveur, et leur épargner à tous deux le chagrin de nos péchés.

En second lieu, je veux parler d’un jeune homme qui est entré digne dans le champ de la mission, mais qui est rentré chez lui prématurément, de son propre choix, en raison d’une attirance pour les personnes du même sexe et d’un traumatisme qu’il a vécu de ce fait. Il était encore digne, mais sa foi était à un niveau critique, son fardeau émotionnel ne cessait de s’appesantir et sa douleur spirituelle était de plus en plus profonde. Il était tour à tour blessé, troublé, en colère et inconsolable.

Son président de mission, son président de pieu et son évêque ont passé des heures innombrables à chercher, à pleurer et à le bénir, restant proches de lui, mais sa blessure était si personnelle qu’il la gardait, au moins en partie, hors de leur atteinte. Le père bien-aimé dans cette histoire a consacré son âme entière à aider cet enfant, mais sa situation d’employé très exigeante faisait que, souvent, seuls ce garçon et sa mère affrontaient les nuits longues et ténébreuses de l’âme. Jour et nuit, d’abord pendant des semaines, puis pendant des mois qui sont devenus des années, ils ont cherché ensemble la guérison. Pendant les périodes d’amertume (celle du garçon surtout, parfois celle de sa mère) et de peur incessante (celle de la mère surtout, parfois celle du garçon), elle a témoigné à son fils du pouvoir de Dieu, de son Église, mais surtout de son amour pour cet enfant. Elle a témoigné par la même occasion de son propre amour inconditionnel et constant pour lui. Pour unir ces deux piliers absolument essentiels, cruciaux, de son existence même, l’Évangile de Jésus-Christ et sa famille, elle a continuellement épanché son âme à Dieu dans la prière. Elle a jeûné et pleuré, elle a pleuré et jeûné, puis elle a écouté encore et encore son fils lui répéter comment son cœur se brisait. Elle l’a ainsi porté de nouveau, mais cette fois ce n’était pas pendant neuf mois. Cette fois, elle a pensé que cela prendrait une éternité de travail dans le paysage chaotique de son désespoir.

Mais, par la grâce de Dieu, par sa propre ténacité et avec l’aide d’un grand nombre de dirigeants de l’Église, d’amis, de membres de la famille et de thérapeutes, cette mère importune a vu son fils rentrer chez lui, dans la terre promise. Malheureusement, nous sommes conscients que cette bénédiction n’est pas accordée, ou du moins pas encore, à tous les parents qui sont angoissés par les situations très diverses de leurs enfants mais, dans ce cas, il y avait de l’espoir. Et je dois dire que l’orientation sexuelle de ce fils n’a pas changé miraculeusement. Personne ne s’attendait à ce que ce soit le cas. Mais petit à petit, son cœur a changé.

Il a commencé à revenir à l’église. Il a choisi de prendre la Sainte-Cène volontairement et dignement. Il a de nouveau obtenu une recommandation à l’usage du temple et a accepté un appel d’instructeur du séminaire matinal, avec lequel il a eu beaucoup de réussite. Et maintenant, après cinq années, il a, à sa demande et avec l’aide considérable de l’Église, réintégré le champ de la mission pour terminer son service pour le Seigneur. J’ai pleuré en pensant au courage, à l’intégrité et à la détermination de ce jeune homme et de sa famille pour qu’il s’en sorte et pour l’aider à garder sa foi. Il sait qu’il doit énormément à beaucoup de gens, mais il sait qu’il doit le plus à deux figures messianiques dans sa vie, deux personnes qui l’ont porté et se sont chargées de lui, ont travaillé avec lui et l’ont délivré : son Sauveur, le Seigneur Jésus-Christ, et sa mère déterminée, rédemptrice et absolument sainte.

Pour finir, une histoire vécue lors de la reconsécration du temple de Mexico, il y a seulement trois semaines. C’est là, en compagnie du président Eyring, que j’ai vu notre amie bien-aimée Lisa Tuttle Pieper se lever lors de ce service de consécration émouvant. Mais elle s’est levée avec de la difficulté parce que, d’un bras, elle supportait sa fille bien-aimée mais gravement handicapée, Dora, tandis que de l’autre elle essayait de manipuler la main droite déficiente de son enfant pour que cette fille de Dieu limitée mais précieuse au regard de l’éternité puisse agiter un mouchoir blanc et, avec des gémissements compréhensibles d’elle seule et des anges du ciel, s’écrier : « Hosanna, hosanna, hosanna à Dieu et à l’Agneau ! »

À toutes les mères de partout, passées, présentes ou à venir, je dis : « Merci. Merci de donner naissance, de forger les âmes, de former la personnalité et de manifester l’amour pur du Christ. » À notre mère Ève, à Sarah, Rebecca et Rachel, à Marie de Nazareth et à une Mère céleste, je dis : « merci pour votre rôle crucial dans l’accomplissement des desseins de l’éternité. » À toutes les mères dans toutes les situations, notamment celles qui sont en difficulté, et toutes le seront, je dis : « Soyez en paix. Croyez en Dieu et en vous. Vous vous débrouillez mieux que vous ne le pensez. Vous êtes en fait des libératrices sur la montagne de Sion et, comme le Maître que vous suivez, votre amour ‘ne périt jamais’ » Je ne peux rendre d’hommage plus grand à qui que ce soit. Au nom de Jésus-Christ. Amen.