« Je ne te délaisserai point, je ne t’abandonnerai point »
Notre Père céleste… sait… que nous apprenons, que nous progressons et devenons plus forts quand nous affrontons et surmontons les difficultés que nous devons traverser.
Dans mon journal ce soir, je vais écrire : « Cela a été l’une des sessions les plus inspirantes de toutes les conférences générales auxquelles j’ai assisté. Tout a été de la nature la plus grande et la plus sacrée. »
Frères et sœurs, il y a six mois, alors que nous nous rencontrions en conférence générale, ma tendre épouse, Frances, reposait à l’hôpital, ayant fait une chute très grave, juste quelques jours auparavant. En mai, après avoir lutté vaillamment pour survivre à ses blessures, elle s’en est allée dans l’éternité. Sa perte m’a profondément affecté. Nous nous sommes mariés au temple de Salt Lake City le 7 octobre 1948. Demain aurait été notre soixante-cinquième anniversaire de mariage. Elle était l’amour de ma vie, ma fidèle confidente et ma meilleure amie. Dire qu’elle me manque est loin d’exprimer la profondeur de mes sentiments.
Cette conférence marque la cinquantième année depuis mon appel au Collège des douze apôtres par David O. McKay. Au cours de toutes ces années, j’ai toujours senti le soutien total de ma douce compagne. Elle a fait d’innombrables sacrifices pour que je puisse accomplir mon appel. Je ne l’ai jamais entendue se plaindre quand il était nécessaire que je passe des jours et parfois des semaines loin d’elle et de nos enfants. Elle était vraiment un ange.
Je souhaite exprimer mes remerciements, ainsi que ceux de ma famille, pour l’extraordinaire déversement d’amour qui nous a été manifesté depuis le décès de Frances. Des centaines de cartes et de lettres ont été envoyées du monde entier exprimant l’admiration qu’elle inspire et des messages de réconfort à notre famille. Nous avons reçu des dizaines de belles compositions florales. Nous sommes reconnaissants des nombreuses contributions qui ont été faites en son nom au fonds missionnaire général de l’Église. Au nom de tous ceux d’entre nous qu’elle a quittés, j’exprime notre profonde reconnaissance pour votre gentillesse et l’expression de votre amour sincère.
Pendant cette période émouvante de séparation, ce qui m’a le plus réconforté a été mon témoignage de l’Évangile de Jésus-Christ et ma certitude que ma chère Frances vit toujours. Je sais que notre séparation est temporaire. Nous avons été scellés dans la maison de Dieu par quelqu’un ayant l’autorité de lier sur la terre et dans les cieux. Je sais qu’un jour nous serons réunis pour ne plus jamais être séparés. C’est cette connaissance qui me soutient.
Frères et sœurs, on peut dire avec certitude que personne n’a jamais vécu totalement exempt de souffrances et de chagrins et il n’y a jamais eu non plus de période de l’histoire de l’humanité qui n’ait pas connu son lot de tumultes et de calamités.
Quand la vie se montre sous un jour cruel, nous sommes tentés de poser la question : « Pourquoi moi ? » Parfois, nous avons l’impression qu’il n’y a pas de lumière au bout du tunnel, ni d’aurore pour chasser les ténèbres de la nuit. Nous nous sentons entourés par la déception de rêves anéantis et le désespoir d’espérances disparues. Nous aussi, nous lançons la supplication biblique : « N’y a-t-il point de baume en Galaad1 ? » Nous nous sentons abandonnés, tristes, seuls. Nous sommes enclins à considérer nos propres malheurs à travers le prisme déformant du pessimisme. Nous sommes impatients que nos problèmes trouvent une solution, oubliant que fréquemment, la vertu céleste de la patience est requise.
Les difficultés que nous rencontrons représentent la mise à l’épreuve réelle de notre aptitude à persévérer. Chacun de nous doit alors répondre à une question fondamentale : Vais-je faiblir ou vais-je aller jusqu’au bout ? Certains chancellent quand ils se trouvent incapables de surmonter leurs difficultés. Aller jusqu’au bout implique de persévérer jusqu’à la toute fin de la vie elle-même.
En méditant sur les événements qui peuvent nous arriver à tous, nous pouvons dire avec Job d’autrefois : « L’homme naît pour souffrir2. » Job était un homme « intègre et droit » qui « craignait Dieu et se détournait du mal3 ». Il était pieu, il était prospère, il a dû affronter une épreuve qui aurait pu anéantir n’importe qui. Dépossédé de ses biens, méprisé par ses amis, écrasé par la souffrance, ébranlé par la perte de sa famille, on lui a dit : « Maudis Dieu, et meurs4. » Il a résisté à cette tentation et a déclaré du plus profond de son âme noble :
« Déjà maintenant, mon témoin est dans le ciel, mon témoin est dans les lieux élevés5. »
« Je sais que mon Rédempteur est vivant6. »
Job garda la foi. Ferons-nous de même quand nous affronterons les épreuves qui seront les nôtres ?
Chaque fois que nous avons tendance à nous sentir écrasés par les afflictions de la vie, souvenons-nous d’autres personnes qui ont vécu la même chose, qui ont persévéré et qui les ont ensuite surmontées.
L’histoire de l’Église dans notre dispensation, qui est celle de la plénitude des temps, fourmille d’expériences de gens qui ont eu des difficultés mais qui sont restés inébranlables et qui ont pris courage. Pour quelle raison ? Ils ont mis l’Évangile de Jésus-Christ au centre de leur vie. C’est ce qui nous permettra de surmonter tout ce que nous pourrons rencontrer. Nous continuerons d’avoir de grandes difficultés, mais nous serons en mesure d’y faire face, de les affronter carrément et d’en sortir victorieux.
Dans notre lit de douleur, sur notre oreiller mouillé par nos larmes, nous sommes portés vers les cieux par cette assurance divine et cette promesse précieuse : « Je ne te délaisserai point, je ne t’abandonnerai point7. » Ce réconfort est inestimable.
En voyageant beaucoup de par le monde pour assumer les responsabilités de mon appel, j’ai appris beaucoup de choses dont la moindre n’est pas que la tristesse et la souffrance sont universelles. Il ne m’est pas possible de mesurer toutes les peines et les douleurs dont j’ai été témoin quand j’ai rendu visite aux personnes qui font face au chagrin, qui connaissent la maladie, qui affrontent le divorce, qui sont aux prises avec un fils ou une fille rebelle ou qui souffrent des conséquences du péché. La liste est sans fin, car des problèmes innombrables peuvent nous affecter. Il est difficile de choisir un exemple et, cependant, quand je songe aux épreuves, mes pensées se tournent vers frère Brems, l’un des instructeurs d’École du Dimanche de mon enfance. C’était un membre fidèle de l’Église, un homme au cœur d’or. Sadie, sa femme, et lui, avaient huit enfants, dont beaucoup avaient le même âge que les enfants de notre famille.
Après que Frances et moi nous sommes mariés et avons changé de paroisse, nous avons vu frère et sœur Brems et des membres de leur famille lors de mariages et d’enterrements, ainsi qu’à des réunions de paroisses.
En 1968, la femme de frère Brems décéda. Deux de ses huit enfants décédèrent aussi au fil des ans.
Un jour, il y a près de treize ans, l’aînée des petites-filles de frère Brems m’a téléphoné. Elle m’a expliqué que son grand-père avait atteint son cent cinquième anniversaire. Elle a poursuivi : « Il vit dans une petite maison de retraite, mais toute la famille se réunit avec lui chaque dimanche et il donne une leçon de l’Évangile. » Elle a ajouté : « Dimanche dernier, Grand-père nous a annoncé : ‘Les enfants, je vais mourir cette semaine. S’il vous plaît, prévenez Tommy Monson. Il saura quoi faire.’ »
J’ai rendu visite à frère Brems dès le lendemain soir. Je ne l’avais pas vu depuis un certain temps. Je ne pouvais pas lui parler, car il avait perdu l’ouïe. Je ne pouvais pas lui écrire de message, car il avait perdu la vue. On m’a dit que sa famille communiquait avec lui en lui prenant un doigt de la main droite pour tracer sur la paume de sa main gauche le nom de la personne qui lui rendait visite. Tout message devait lui être communiqué de la même façon. C’est ce que j’ai fait en lui prenant le doigt et en traçant : « T-O-M-M-Y M-O-N-S-O-N », le nom par lequel il m’avait toujours connu. Frère Brems, tout content, m’a pris les mains et les a mises sur sa tête. J’ai su qu’il désirait recevoir une bénédiction de la prêtrise. Le chauffeur qui m’avait amené à la maison de retraite s’est joint à moi. Nous avons posé les mains sur la tête de frère Brems et lui avons donné la bénédiction qu’il désirait. Après cela, des larmes ont ruisselé de ses yeux aveugles. Il nous a agrippé les mains en signe de gratitude. Bien qu’il n’ait pas entendu la bénédiction que nous lui avons donnée, l’Esprit était fort et je crois qu’il a su par inspiration que nous lui avions donné la bénédiction dont il avait besoin. Cet homme bon ne voyait plus. Il n’entendait plus. Il était confiné nuit et jour dans une petite chambre d’une maison de retraite. Et cependant, le sourire sur son visage et les mots qu’il a dit m’ont ému. Il a dit : « Merci, mon Père céleste a été si bon envers moi. »
Comme il l’avait prédit, frère Brems est décédé dans la semaine qui a suivi. Il ne s’est jamais concentré sur ce qui lui manquait. Il était toujours profondément reconnaissant de ses nombreuses bénédictions.
Notre Père céleste qui nous permet de nous réjouir de tant de choses, sait aussi que nous apprenons, que nous progressons et devenons plus forts quand nous affrontons et surmontons les difficultés que nous devons traverser. Nous savons qu’il y aura des moments où nous éprouverons des douleurs déchirantes, où nous aurons du chagrin et où nous serons mis à l’épreuve jusqu’aux limites de notre résistance. Cependant, ces difficultés nous permettent de devenir meilleurs, de rebâtir notre vie de la manière que notre Père céleste enseigne et de devenir différents de ce que nous étions, meilleurs, plus compréhensifs et plus compatissants que nous l’étions, avec un témoignage plus fort qu’auparavant.
Ce devrait être notre objectif : non seulement de persévérer et de supporter, mais aussi de nous affiner spirituellement en progressant au travers des bons et des mauvais moments. S’il n’y avait pas de difficultés à surmonter ni de problèmes à résoudre, nous resterions essentiellement comme nous sommes, progressant peu ou pas vers notre but qu’est la vie éternelle. Le poète a exprimé à peu près la même pensée en ces mots :
Le bon bois ne grandit pas sans lutter,
Plus fort le vent, plus dur le bois.
Plus loin le ciel, plus haute la stature,
Plus rude l’hiver, plus forte la ramure.
Le soleil, le froid, la pluie, la neige,
Font des arbres et des hommes puissants8.
Seul le Maître connaît les profondeurs de nos épreuves, de notre douleur et de notre souffrance. Lui seul nous offre la paix éternelle dans les moments d’adversité. Lui seul touche notre âme torturée de ses paroles réconfortantes :
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos.
« Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez du repos pour vos âmes.
« Car mon joug est doux, et mon fardeau léger9. »
Dans les meilleurs moments comme dans les pires, il est avec nous. Il a promis que cela ne changerait jamais.
Mes frères et sœurs, puisse notre engagement envers notre Père céleste ne pas fluctuer selon les années ou selon les crises que nous rencontrons. Nous ne devrions pas avoir besoin de traverser des difficultés pour nous souvenir de lui et nous ne devrions pas être forcés à l’humilité avant de lui donner notre foi et notre confiance.
Puissions-nous toujours nous efforcer d’être proches de notre Père céleste. Pour ce faire, nous devons le prier et l’écouter chaque jour. Nous avons vraiment besoin de lui à chaque heure, que ce soient des heures de soleil ou de pluie. Que sa promesse soit toujours notre mot d’ordre : « Je ne te délaisserai point, je ne t’abandonnerai point10. »
Avec toute la force de mon âme, je témoigne que Dieu vit et qu’il nous aime, que son Fils unique a vécu et est mort pour nous et que l’Évangile de Jésus-Christ est cette lumière pénétrante qui brille dans les ténèbres de notre vie. Qu’il en soit toujours ainsi. C’est là ma prière, au nom sacré de Jésus-Christ. Amen.