2019
Gabin du Gabon
Août 2019


LES VOIX DES MEMBRES

Gabin du Gabon

C’était en automne 1997 et Gabin Mendene venait de passer les examens du baccalauréat à son école secondaire à Libreville, la capitale du Gabon. C’était un accomplissement remarquable personnel et il comptait poursuivre ses études au niveau universitaire. Il espérait profiter d’un programme de bourses d’études qui avait été mis en place des années auparavant par le gouvernement de ce pays africain francophone. Le programme finançait des étudiants admissibles à l’université qui ont été acceptés dans une université publique ou privée partout dans le monde.

Gabin avait fait une demande d’inscription à l’Institut Supérieur Industriel à Mons, une université technique située dans la ville de Mons au Sud de la Belgique, et y avait été admis. La bourse d’études du gouvernement couvrait les frais de scolarité, fournitures, logement et nourriture. Il a également reçu un billet d’avion aller simple pour le voyage de 8 000 km de Libreville à Bruxelles. Le billet de retour lui serait envoyé après l’obtention du diplôme.

Pendant les quatre années suivantes, il a fait un programme d’études en génie électrique et après l’obtention de son diplôme en 2002, Gabin s’est préparé pour retourner chez lui à Libreville. Son programme d’études avait pris fin et il avait reçu le dernier de ses fonds de bourses d’études. Il a communiqué avec le bureau du programme de bourses au Gabon concernant son billet d’avion de retour et était surpris d’apprendre qu’en raison de certains contretemps administratifs, le financement de son billet d’avion de retour serait retardé. Gabin était dévasté et s’est senti complètement bloqué dans une situation difficile. Il n’avait pas d’argent, ni d’endroit où habiter, ni la moindre chance de se trouver même un emploi temporaire puisqu’il vivait en Belgique avec un visa d’étudiant.

C’est au cours de cette période difficile qu’il a rencontré deux jeunes hommes, frère Roueché et frère Marin, à Charleroi, en Belgique. Ils l’ont instruit sur le Livre de Mormon et sur l’Évangile de Jésus-Christ. « C’étaient quelques-unes des idées les plus drôles que j’ai jamais entendues : des anges, plaques d’or et prophètes vivants à notre époque moderne », raconte Gabin. Après quelques leçons, les missionnaires l’ont invité à se rendre à la paroisse de Charleroi avec eux. Gabin a protesté. « Je ne voulais pas aller à l’église avec eux. » Mais, il a finalement dit aux missionnaires qu’il « irait à l’église une fois » et ensuite il voulait qu’ils le laissent tranquille.

Le dimanche suivant, ils se sont rencontrés sur le trottoir devant la salle de culte de Charleroi et ils y sont entrés par la porte principale. À ce jour, Gabin se souvient de ce moment où ses pieds ont touché le tapis à l’intérieur du bâtiment. Il a entendu une voix, en réalité, comme une sensation électrique, lui dire que c’était un endroit où il appartenait. Après le culte, il a dit aux missionnaires qu’il voulait se faire baptiser. Cela s’est passé peu de temps après.

Pendant ce temps, la situation du billet de retour de Gabin à Libreville restait inconnue. Heureusement, la famille Havrenne, membres de la paroisse de Charleroi, a invité Gabin à vivre chez eux à Erquelinnes, une petite ville près de Charleroi, pendant que sa situation au Gabon était en train d’être réglée. Après plusieurs semaines, ses hôtes ont insisté pour qu’il reste et lui ont proposé d’aider à faire du jardinage autour de la maison. « C’était une période difficile de ma vie », raconte Gabin. « J’étais là, ingénieur électronicien qualifié, sans argent ni emploi, bloqué en Belgique, en train de tailler les buissons et d’arracher les mauvaises herbes. Mais dans tout cela, j’ai appris à être humble et cette expérience a été l’une des meilleures leçons de ma vie. »

En 2005, Gabin travaillait encore pour son logement et sa nourriture comme jardinier, et il luttait toujours avec le gouvernement du Gabon pour organiser son retour. Son visa d’étudiant belge était expiré depuis longtemps. Dans une correspondance limitée avec son frère aîné à Libreville, Gabin a appris que sa famille était très découragée par la situation et voulait désespérément qu’il revienne au pays.

À cette période, il avait reçu la prêtrise de Melchisédek et avait été ordonné ancien. Il a également reçu sa bénédiction patriarcale. Lors des entretiens séparés, son évêque et son président de pieu lui ont demandé s’il pourrait être intéressé à faire une mission à plein temps. Gabin a répondu : « Oui, je le ferais. » Une recommandation missionnaire a été remplie et envoyée et, quelques semaines plus tard, Gabin a reçu de Salt Lake City son appel en mission. On l’a avisé d’arriver au centre de formation des missionnaires le 20 juin 2006 et ensuite de se présenter à la mission de Bruxelles (Belgique) à 60 kilomètres de là où donc il résidait.

La préparation missionnaire a commencé sérieusement et Gabin s’est rendu au temple de La Haye aux Pays-Bas où il a reçu sa dotation. Il était désireux de servir les deux années suivantes comme missionnaire à plein temps, mais après avoir informé sa famille à Libreville de ses intentions, ils se sont fâchés contre lui. Ils ne pouvaient pas comprendre pourquoi il était intéressé à partir en mission. « Tu dois retourner au pays », lui a-t-on dit. « Après tout, nous t’avons supporté et c’est égoïste de ne pas vouloir retourner au pays pour aider la famille. » Gabin est devenu confus et au cours de cette lutte personnelle, il a rencontré Kevin S. Hamilton, qui était à l’époque président de la mission de Bruxelles (Belgique) et qui allait devenir son président de mission. Il a demandé ses avis et conseils. Le président Hamilton lui a dit : « Aie confiance en Dieu, les choses arrivent pour une raison. Tout se passera bien, mais de manière inattendue. »

Quelques jours avant son départ, et par un coup du sort qui ne peut être compris qu’en revenant en arrière plusieurs années plus tard, Gabin a reçu deux lettres officielles par la poste. L’une, en provenance du gouvernement de la Belgique, indiquant qu’on avait récemment découvert qu’il vivait en Belgique avec un visa d’étudiant expiré et ordonnant qu’il soit immédiatement déporté au Gabon. La seconde lettre provenait de Libreville et contenait son billet d’avion de retour.

Le président de pieu a recommandé que Gabin rentre chez lui et qu’il travaillerait ensuite avec le département missionnaire à Salt Lake City pour régler les problèmes. Ainsi, au printemps 2006, neuf ans après avoir quitté sa famille à Libreville, Gabin rentrait finalement chez lui. Il a fait ses valises, et parmi ses possessions personnelles se trouvaient deux exemplaires du Livre de Mormon, son appel en mission, les DVD des deux conférences générales de 2004 de l’Église, sa bénédiction patriarcale, quelques reçus de dîme et une paire de sous-vêtements du temple.

Au cours des semaines qui ont suivi, le président de pieu de Charleroi a travaillé avec le département missionnaire à Salt Lake City pour régler cette situation inhabituelle. Les choses sont devenues encore plus compliquées, car, en 2006, l’Église n’était pas officiellement reconnue par le gouvernement du Gabon et aucune paroisse ou aucun pieu n’était organisé dans le pays. Gabin, qui vit maintenant au Gabon, n’avait aucun dirigeant local de la prêtrise. Le gouvernement belge n’était pas disposé à délivrer un visa missionnaire en raison de l’expiration du visa d’étudiant. Finalement, la décision a été prise d’annuler son appel en mission. Gabin était chez lui pour y rester.

Il s’est installé avec son frère aîné et, au cours de cette année, il a trouvé un emploi en tant que technicien en électronique dans une entreprise locale. Les rêves de ses études supérieures commençaient à devenir réalité.

Sans aucune unité de l’Église organisée à Libreville, Gabin tenait chez lui des réunions officieuses le dimanche et des soirées familiales le lundi. Des amis et quelques membres de la famille y assistaient avec intérêt. Gabin enseignait à partir du Livre de Mormon et ils regardaient les sessions de la conférence générale de 2004.

Pendant tout ce temps, les services Internet au Gabon étaient peu fiables et coûteux, et accéder aux sites Web basés en dehors du pays était presque impossible. De temps à autre, Gabin pouvait accéder aux sites Web de l’Église et télécharger un ou deux discours de la conférence générale. Ils les imprimaient et les ajoutaient à ses « plans de leçons ».

En 2008, il a rencontré Fleur et est tombé profondément amoureux. Gabin raconte : « J’ai trouvé une fille ! » Fleur avait une fille, Ève, et il l’a bien aimée aussi. Fleur et Ève fréquentaient habituellement une église protestante locale, mais durant leurs fréquentations, il leur enseignait des leçons missionnaires. Elles ont commencé à assister à ses réunions dominicales et soirées familiales le lundi. Gabin et Fleur se sont mariés civilement en 2013.

Au début de 2014, Gabin a trouvé un article en ligne rapportant que David A. Bednar, du Collège des douze apôtres, avait été à Libreville quelques mois plus tôt. C’était juste après que le gouvernement gabonais avait officiellement reconnu l’Église et avait permis le début des activités missionnaires. Frère Bednar avait consacré le pays du Gabon à la prédication de l’Évangile et il avait organisé la branche de Libreville. Gabin était stupéfait. Pendant plus de huit ans, il avait probablement été le seul membre de l’Église vivant au Gabon ayant reçu sa dotation et soudainement, une branche était organisée dans sa ville natale.

À l’aide d’une adresse électronique figurant dans l’article, Gabin a écrit au bureau interrégional d’Afrique du Sud-est posant des questions sur la situation de l’Église à Libreville. Élie Monga, président de la mission de Brazzaville (République du Congo), en a été informé et quelques jours plus tard, alors qu’il était au travail, Gabin a reçu la visite de Michael Moody, premier missionnaire d’âge mûr appelé à servir au Gabon.  

Après leur accueil initial, Gabin a dit à frère Moody : « J’ai quelques questions. Premièrement, où puis-je payer ma dime ? » Pendant plus de huit ans, Gabin avait soigneusement gardé son argent de dîme dans une petite boîte.

« Deuxièmement », a-t-il demandé, « où puis-je acheter de nouveaux sous-vêtements du temple ? Il y a huit ans, j’ai apporté une paire de sous-vêtements du temple à Libreville, et tous les soirs depuis lors je les lave soigneusement à la main. » Frère Moody est allé à la voiture, a ouvert sa valise et lui a donné une paire de sous-vêtements du temple tout neuf lequel il était inspirait de mettre dans sa valise de voyage ce matin-là.

Le dimanche suivant, Gabin, Fleur et Ève, Yann, son neveu, et Annaïck et Pauline, les nièces de Fleur, étaient six des dix personnes ayant assisté à la réunion de Sainte-Cène à Libreville. Fleur a appris les leçons missionnaires et peu de temps après elle a été baptisée et confirmée membre de l’Église. Ainsi l’étaient Ève, Yann, Annaïck et Pauline.

En 2015, Gabin a adopté Ève. Et plus tard cette année-là, tous les trois, Gabin, Fleur et Ève ont pris l’avion pour Johannesburg, en Afrique du Sud, où cette histoire extraordinaire se termine par des effets éternels importants. Fleur a reçu sa dotation, elle et Gabin ont été scellés ensemble, et Ève a été scellée à eux tous deux dans le temple de Johannesburg en Afrique du Sud.

Épilogue

En 2016, Élie Monga, président de la mission de Brazzaville (République du Congo), s’est rendu à Libreville pour présider la division de la branche de Libreville. Gabin Mendene a été appelé comme président de la branche de Libreville 2. Peu de temps après, alors qu’il assistait à la conférence de district, Kevin S. Hamilton, ancien président de la mission de Bruxelles (Belgique) et maintenant soixante-dix-autorité générale et président de l’interrégion d’Afrique du Sud-est, depuis son siège sur l’estrade guettait. Et assis là, au milieu de l’assemblée, était Gabin du Gabon, la personne qu’il n’avait pas vue depuis dix ans, un homme patient ayant une histoire de conversion extraordinaire et un pionnier de l’Église en Afrique.