« ‘Un évêque pour l’Église’ », Révélations dans leur contexte, 2016
« ‘Un évêque pour l’Église’ », Révélations dans leur contexte, 2016
« Un évêque pour l’Église »
Doctrine et Alliances 41, 42, 51, 54, 57
À l’automne 1830, quatre jeunes gens vers la fin de l’adolescence ou d’une vingtaine d’années arrivèrent devant la chapellerie d’Edward Partridge, à Painesville, en Ohio. Edward Partridge écouta l’histoire incroyable de ces hommes qui parlaient du rétablissement de l’autorité et de révélation de nouvelles Écritures ; il les traita d’imposteurs et les chassa. Pourtant, après leur départ, il envoya l’un de ses employés après ces hommes pour acheter un exemplaire du livre qu’ils transportaient, appelé Livre de Mormon1.
Edward Partridge et sa femme, Lydia, cherchaient une Église qui enseignait l’Évangile du Nouveau Testament dans sa clarté et apportai la preuve qu’elle avait l’autorité divine de diriger l’Église. Lorsqu’elle entendit le message des missionnaires, Lydia reconnut dans leurs enseignements des vérités qu’elle avait lues dans la Bible et se fit baptiser2. Edward Partridge resta sceptique mais, après être allé à New York pour rencontrer le prophète Joseph, il se fit baptiser, lui aussi.
Vers cette époque, Joseph Smith reçut une révélation dans laquelle le Seigneur promit à Edward Partridge : « Tu recevras mon Esprit, le Saint-Esprit, oui, le Consolateur, qui t’enseignera les choses paisibles du royaume. » Suite à cette confirmation, le Seigneur appella Edward Partridge à prêcher son Évangile « comme avec la voix d’une trompette3 ». Edward Partridge partit faire connaître sa nouvelle religion à ses parents et à ses frères et sœurs dans le Massachusetts. Les membres de sa famille, pour la plupart, n’étaient pas réceptifs à son message, mais il accomplit sa mission de leur prêcher l’Évangile4.
Le 4 février 1831, dès le retour d’Edward Partridge en Ohio, Joseph Smith reçut une révélation (maintenant Doctrine et Alliances 41) pour l’appeler premier évêque de l’Église, dix mois après sa création. L’office d’évêque était l’un des premiers offices de la prêtrise rétablis dans cette dispensation et, comme pour les autres, la compréhension des devoirs de l’évêque était venue ligne sur ligne. Contrairement aux évêques aujourd’hui, Edward Partridge reçut l’instruction non seulement d’« être ordonné évêque de l’Église », mais aussi « de laisser son commerce et de consacrer tout son temps aux travaux de l’Église5 ».
Sans manuel et sans aucun précédent, il devait probablement se demander ce qu’étaient exactement les « travaux de l’Église » qu’il devait accomplir. Heureusement, quelques jours plus tard, Joseph reçut une révélation (appelée « la loi » par les premiers membres de l’Église) qui contenait des renseignements supplémentaires sur ses devoirs d’évêque.
Dans cette révélation (qui se trouve maintenant dans Doctrine et Alliances 42), le Seigneur commandait aux saints de lui consacrer tous leurs biens par l’intermédiaire de l’évêque et de ses conseillers « avec une alliance et un acte qui ne peuvent être rompus ». Ensuite celui qui consacrait ses biens devait recevoir une intendance de l’évêque « suffisante pour lui-même et sa famille ». L’évêque était responsable de gérer et de garder le reste des biens dans un magasin pour « être distribués aux pauvres et aux nécessiteux », ainsi que pour acheter des terres et édifier Sion6.
Edward était face à l’une de ses premières tâches d’évêque, avec l’arrivée en l’Ohio des saints qui avaient reçu le commandement de fuir l’État de New York. Il était chargé de les installer sur des terres qui seraient leur héritage. Leman Copley, qui faisait partie des premiers membres de l’Église, proposa de permettre aux saints de Colesville, dans l’État de New York, de s’installer sur les trois cents hectares qu’il possèdait à Thompson en Ohio, à environ trente-six kilomètres de Kirtland. Edward Partridge avait besoin de révélation plus précise sur la façon d’organiser les saints de Colesville sur les terres de Leman Copley. Le Seigneur répondit en lui donnant des instructions par l’intermédiaire de Joseph Smith. Ces instructions se trouvent maintenant dans Doctrine et Alliances 51. Le Seigneur informait Edward Partridge qu’une fois les terres divisées entre les saints de Colesville, il devait désigner leurs parts aux gens, « chaque homme étant égal selon sa famille, selon sa situation, ses besoins et ce qui lui est nécessaire ». Edward Partridge avait encore des biens à Painesville et n’avait pas besoin de terre. Cependant il lui fut dit dans la révélation que, comme il était évêque, pour compenser son emploi de chapelier à plein temps auquel il avait dû renoncer, il pouvait retirer des fournitures du magasin pour subvenir aux besoins de sa famille7.
Le fait de vivre la loi de consécration devait être considéré comme une faveur8. Mais tout le monde ne voyait pas les choses de cette façon. Leman Copley finit par retirer son offre et expulsa de ses terres les saints de Colesville, qui ne savaient pas où aller9. Le 10 juin, une révélation (maintenant Doctrine et Alliances 54) répondit à leur préoccupation de façon surprenante : il leur fut dit de partir définitivement au Missouri, à près de mille trois cents kilomètres10.
À peu près au même moment, Joseph Smith, Edward Partridge et d’autres membres se préparèrent aussi à partir au Missouri, l’emplacement prévu de la future ville de Sion11. Edward Partridge partit pensant qu’il reviendrait dans quelques mois. Mais à l’arrivée des anciens à Independence, dans le Missouri, ville frontière à l’extrême ouest de l’État, Joseph Smith reçut une révélation (qui se trouve maintenant dans Doctrine et Alliances 57) déclarant qu’Independence devait être le centre de la Sion des derniers jours. La révélation contenait aussi un impératif décourageant : « Il est sage que la terre soit achetée par les saints, ainsi que tous les terrains qui se trouvent à l’ouest, et ce, jusqu’à [la limite occidentale du Missouri] ; et aussi tous les terrains en bordure des prairies. » De plus le Seigneur commandait : « Que mon serviteur Edward Partridge remplisse l’office auquel je l’ai désigné et répartisse aux saints leur héritage, comme je l’ai commandé. » Ensuite le Seigneur appella plusieurs personnes à rester au Missouri pour édifier Sion. Contrairement à ses projets, Edward Partridge se trouva parmi les personnes destinées à s’installer le plus rapidement possible au pays de Sion avec leur famille pour faire ce que le Seigneur avait dit12.
Dans une lettre adressée à Lydia écrite quelques jours plus tard, Edward lui annonça qu’il ne reviendrait pas en Ohio cet été-là mais lui demandait de le rejoindre avec leurs cinq filles dans la région frontière du Missouri. En outre, au lieu de revenir en Ohio pour les aider à déménager en automne, il écrivit : « Frère Gilbert ou moi devons être ici pour superviser les ventes en décembre et ne sachant pas s’il peut revenir à ce moment-là, j’ai considéré qu’il était préférable de rester ici pour l’instant contrairement à ce que j’espérais. » Il la prévint aussi de la situation une fois qu’elle l’aurait rejoint au Missouri : « Nous allons souffrir et devrons subir, pendant un certain temps, de nombreuses privations que toi et moi n’avons pas connues depuis des années. » Conformément aux instructions données de tenir conseil ensemble et avec le Seigneur, il fit des suggestions sur la façon dont les filles et elle pourraient entreprendre le voyage, puis suggèra qu’elle agisse au mieux13. Lydia obéit de bon gré à la révélation de déménager, emballa ses affaires, emmena ses cinq filles dans un endroit dans l’ouest qu’elle n’avait jamais vu auparavant.
Au Missouri, anticipant l’arrivée imminente des saints de Colesville et de beaucoup d’autres personnes, Edward suivit les directives du Seigneur de se préparer « à réparti[r] aux saints leur héritage » et commença à acheter des terres deux semaines après son arrivée dans la région. Pendant qu’il installait les saints sur leur terre, il suivit les instructions qu’il avait reçues en mai : « Quand il désignera sa part à un homme, qu’il lui donne un écrit qui la lui assurera pour qu’il la garde14. »
En réponse à cette révélation, Edward Partridge imprima des actes de consécration comportant deux parties. Sur la première partie, il nota minutieusement les propriétés et les biens que le membre de l’Église ou la famille « déposait devant l’évêque ». En retour, il nota minutieusement sur la deuxième partie de l’acte les propriétés ou les biens dont le membre recevait l’intendance, en général, les mêmes que ceux qu’il avait consacrés. Chaque membre était alors nommé « intendant de ses propres biens, ou de ce qu’il [avait reçu par consécration]15 ».
Edward agit comme représentant du Seigneur pour de nombreux saints qui choisissaient de vivre selon la loi de consécration et d’accepter l’invitation du Seigneur à agir selon les principes de l’intendance, du libre arbitre et de la responsabilité. Encore une fois, tout le monde ne souhaita pas vivre selon la loi. Certains achetèrent eux-mêmes des terres. D’autres, comme Leman Copley et un autre homme du nom de Bates, firent don de terres ou d’argent puis changèrent d’avis et exigèrent qu’on les leur rende. Edward Partridge fut appelé à édifier et encourager les saints récalcitrants aussi bien que ceux qui étaient réceptifs. John Whitmer écrivit qu’après que la loi de consécration eut été reçue, « l’évêque Edward Partridge rendit visite à plusieurs branches de l’Église où se trouvaient quelques-uns qui ne voulaient pas accepter la loi16 ».
Emily Dow, fille d’Edward Partridge, parla plus tard des difficultés à gérer des saints imparfaits : « Quand je me remémore la grande responsabilité qui reposait sur mon père comme premier évêque ; sa pauvreté, les privations et les épreuves qu’il a dû endurer, les accusations de faux frères, la critique des pauvres et les persécutions de nos ennemis, je ne m’étonne pas de sa mort prématurée17. » La bénédiction patriarcale d’Edward Partridge contenait cette mise en garde : « Tu rempliras ton office jusqu’à en être las et désirer démissionner afin de te reposer pour un peu de temps18. »
Outre qu’il devait tenir compte des faiblesses humaines d’autrui, il faisait face à la réalité de sa propre nature déchue. Il semblait douter de la possibilité de réussir lorsqu’il était confronté aux difficultés de l’édification de Sion avec peu de moyens visibles. En réponse, le Seigneur l’avertit : « Mais s’il ne se repent pas de ses péchés, qui sont l’incrédulité et l’aveuglement du cœur, qu’il prenne garde de peur de tomber19. » La lettre qu’il envoya en août 1831 à Lydia révélait le manque de confiance qu’il éprouvait à ce poste. Il écrivit : « Tu sais que j’occupe un poste important et comme je suis parfois châtié, j’ai parfois l’impression que je dois tomber, non pas abandonner la cause, mais je crains que mon poste soit au-delà de ce que je suis en mesure d’accomplir pour recevoir l’approbation de mon Père céleste. » Puis, il demanda à sa femme : « Prie pour que je ne chute pas20. »
Deux ans plus tard, en juillet 1833, une foule d’hommes en colère entrèrent chez Edward Partridge, où il était assis avec sa femme et son fils âgé de trois semaines, qui portait son nom, Edward Partridge, fils. Ils le traînèrent sur la place centrale d’independence, où ils le battirent et l’enduisirent de goudron et de plumes. Trois jours plus tard, Edward et cinq autres hommes offrirent sans hésiter leur vie pour le reste des saints afin d’essayer d’empêcher d’autres actes de violence contre eux. Leur offre fut refusée et les hommes furent contraints d’accepter de quitter le comté de Jackson. Quelques semaines plus tard, Edward Partridge écrivit à ses amis en Ohio : « Je suis disposé à me consacrer et à être consacré, à la cause de mon Maître béni21. »
Les révélations appelant Edward Partridge évêque et définissant ses devoirs dans cet office façonnèrent le reste de sa vie. Il continua à servir en tant qu’évêque pendant toute la période où les saints étaient au Missouri et en Illinois. Au printemps de 1840, pendant qu’il construisait une maison pour sa famille à Nauvoo, il tomba malade. Il mourut le 27 mai 1840, laissant une femme et cinq enfants âgés de six à vingt ans.
Quand il fut appelé évêque, le Seigneur le décrivit comme étant quelqu’un dont le cœur était pur devant lui, car il était semblable au Nathanaël d’autrefois, dans lequel il n’y avait point de fraude22. Un des premiers membres de l’Église, David Pettigrew, décrivit Edward Partridge comme « un Monsieur, qui a rempli avec une grande dignité cet office grandiose qu’il a occupé, comme le décrit le Nouveau Testament. Sa manière était grave et réfléchie, encore qu’agréable et plaisant ; sa famille, comme lui-même, était très agréable23. » W. W. Phelps écrivit, en parlant de lui : « Peu d’hommes seront en mesure de porter son manteau avec une dignité aussi simple. C’était un honnête homme, et je l’aimais24. » Huit mois après la mort d’Edward Partridge, le Seigneur révèla que le premier évêque fidèle de l’Église rétablie était avec lui25.