Vie et ministère de Spencer W. Kimball
Un soir d’automne du début du vingtième siècle, Orville Allen, s’est arrêté chez Andrew Kimball pour livrer des citrouilles. Alors qu’ils les déchargeaient, les deux hommes ont entendu Spencer, fils d’Andrew, qui chantait dans la grange tout en trayant les vaches. Frère Allen a dit à Andrew: « Votre fils doit être heureux. » Andrew a répondu : « Oui, il est toujours heureux. C’est un garçon propre et obéissant qui fait toujours attention à ce que je lui demande de faire. Je l’ai consacré au service du Seigneur. Il deviendra un grand homme dans l’Église1. »
Grâce à des années de préparation, Spencer est effectivement devenu un grand homme. Le Seigneur « ne préparait pas seulement un homme d’affaires, ni un homme public, ni un orateur, ni un poète, ni un musicien, ni un enseignant, bien qu’il allât être tout cela. Il préparait un père, un patriarche pour sa famille, un apôtre et prophète et un président pour son Église 2. »
Ses ancêtres et ses parents
La famille de Spencer W. Kimball avait des liens très profonds avec l’Église rétablie. Ses grands-pères paternel et maternel étaient des hommes en vue aux premiers temps du rétablissement de l’Église. Heber C. Kimball a été appelé au Collège des douze apôtres quand il a été organisé en 1835. Il a servi par la suite comme premier conseiller du président Young pendant plus de vingt ans. Il a toujours servi fidèlement le Seigneur, tout au long de son ministère. Edwin D. Woolley, grand-père maternel de Spencer, était Quaker en Pennsylvanie, avant d’accepter l’Évangile à l’époque de Joseph Smith. Il a été un évêque respecté dans la vallée de Salt Lake. De temps à autre, il s’est aussi occupé des affaires personnelles de Brigham Young. Le souci que frère Woolley avait des nécessiteux ainsi que son engagement indéfectible envers l’Évangile ont constitué un héritage durable qui s’est transmis à ses descendants.
La grand-mère de Spencer, Ann Alice Gheen Kimball était « une femme fidèle… timide en société, grande et peu jolie, qui aimait les faibles et les malades3. » Andrew Kimball était son troisième fils. L’autre grand-mère de Spencer, Mary Ann Olpin Woolley, venait d’Angleterre et a eu onze enfants, dont le sixième a été nommé Olive.
Andrew Kimball a épousé Olive Woolley le 2 février 1882, à Salt Lake City, où ils se sont installés. Environ trois ans plus tard, Andrew a reçu l’appel de quitter son foyer et de servir dans la mission du territoire indien, qui se trouve dans l’actuel État d’Oklahoma. Après avoir servi pendant deux ans et demi comme missionnaire à plein temps, il a été appelé à présider la mission. Ce nouvel appel lui a permis de vivre chez lui avec sa famille, en Utah, et ainsi pendant les dix années qui ont suivi, il a dirigé la mission au moyen de lettres et de voyages dans la région.
Les 12 ans de service d’Andrew dans la mission du territoire indien ont bientôt été suivis par un autre appel, cette fois à s’installer dans la vallée de la Gila, dans la région centre-sud de l’Arizona. Là, il a été appelé à présider le pieu de St Joseph, regroupant les membres de l’Église installés dans cette région. En 1898, Andrew, Olive et leurs six enfants (dont Spencer âgé de trois ans), ont fait leurs bagages et sont partis à quelque mille kilomètres au sud de Salt Lake City.
Enfance
Spencer Woolley Kimball est né le 28 mars 1895 ; il était le sixième des onze enfants d’Andrew et Olive Kimball.
Se rappelant la campagne d’Arizona de son enfance, il a écrit : « C’était une région aride, qui était cependant fertile grâce aux efforts de travailleurs déterminés 4. » Il a ajouté : « Nous habitions dans une petite ferme au sud de Thatcher (Arizona). Notre maison était bordée de champs au sud et à l’est. Derrière se trouvaient le puits, la pompe, le moulin à vent, une grande citerne en bois contenant notre réserve d’eau, la cabane à outils et, un peu plus loin, un très grand tas de bois. Puis, il y avait la porcherie, les corrals, les meules de foin et le grenier 5. »
Les parents de Spencer lui ont appris d’importantes leçons de l’Évangile, tôt dans sa vie. « Je me rappelle, quand j’étais jeune », a-t-il dit, « avoir marché avec ma mère sur la route poussiéreuse menant à la maison de l’évêque à une époque où nous payions souvent la dîme avec nos animaux et nos produits. Tout en marchant, je lui ai dit : ‘Pourquoi apportons-nous des œufs à l’évêque?’ Elle a répondu : ‘Parce que ce sont des œufs pour payer la dîme et que l’évêque reçoit la dîme pour notre Père céleste.’ Ma mère m’a ensuite raconté que chaque soir lorsqu’on rentrait les œufs, on mettait le premier dans un petit panier et les neuf autres dans un grand panier 6. »
L’exemple de consécration d’Andrew Kimball a beaucoup influencé Spencer, qui a dit plus tard : « Mes premières impressions du travail d’un président de pieu me sont venues tandis que j’observais mon propre père… Je crois que mon père, en servant ainsi son peuple, a accompli une bénédiction que lui avait donnée le président Joseph F. Smith, qui avait promis que les gens de la vallée de la Gila ‘le rechercheraient comme des enfants leur père.’ » Bien que je sois certain de ne pas avoir alors totalement apprécié son exemple, les normes qu’il a établies sont dignes de tout président de pieu 7. »
La famille Kimball vivait modestement. « Nous ne savions pas que nous étions pauvres, a dit Spencer. « Nous pensions que nous vivions bien 8. » Leurs vêtements étaient fabriqués à la maison et passaient de l’un à l’autre. Leurs repas étaient simples, et étaient constitués de viande et de ce qu’ils produisaient chez eux.
Spencer aidait aux travaux de la ferme. Il a raconté : « Je pompais l’eau à la main pour arroser le jardin et j’ai aussi appris à traire les vaches, tailler les arbres fruitiers, réparer les clôtures et tout le reste. J’avais deux grands frères qui, j’en étais convaincu, faisaient tout ce qui était facile et me laissaient faire tout ce qui était difficile. Mais je ne m’en plains pas : cela m’a rendu fort 9. » À partir de l’âge de neuf ans, Spencer a appris par cœur les Articles de Foi, les dix commandements et la plupart des cantiques de l’Église pendant qu’il trayait les vaches et abreuvait les chevaux, chaque jour.
Quand Spencer a eu onze ans, sa mère est morte. Cela a été l’une des grandes épreuves de sa jeune vie. Il s’est demandé comment la famille pourrait survivre. « Mais j’ai alors découvert, a-t-il dit, comme je l’ai constaté depuis lors, à de nombreuses reprises, que l’on peut supporter presque n’importe tout 10. » Plus tard, Andrew Kimball s’est remarié et Josephine Cluff est devenue la belle-mère de Spencer. « Josie », comme l’appelaient ses amis, ne pouvait pas remplacer totalement Olive dans la vie de Spencer, mais sa patience et ses autres capacités ont apporté la stabilité à la famille Kimball.
Pendant sa jeunesse, Spencer a non seulement appris à travailler dur dans un endroit rude, mais il a aussi acquis plusieurs autres choses qui l’ont préparé à rendre de plus grands services plus tard dans sa vie. Il a appris à chanter et à diriger la musique et est devenu membre du chœur de pieu à l’âge de quinze ans. Bien qu’il ait dit que ses doigts étaient « courts et dodus 11», il s’est appliqué à apprendre à lire la musique et à jouer du piano. Il a ainsi travaillé jusqu’à pouvoir jouer les cantiques et faire partie d’un petit orchestre. Bien des années plus tard, il a accompagné, à tour de rôle avec Harold B. Lee, les réunions hebdomadaires du Collège des douze apôtres.
Spencer a commencé à aller à l’école, un peu plus tard que la plupart des autres enfants, comme le rapporte le récit suivant : « La mère de Spencer pensait que les enfants n’étaient pas assez mûrs pour entrer à l’école avant l’âge de sept ans. Ainsi, quand Spencer a commencé l’école il avait un an de retard par rapport aux autres enfants… Le midi, il avait l’habitude de courir chez lui pour abreuver les animaux, avec l’eau de la pompe, nourrir les porcs et prendre son repas. Un jour sa mère lui a dit : ‘Que fais-tu à la maison, pendant la récréation? Il n’est pas encore midi.’ Il est reparti à l’école en courant et a trouvé ses camarades en classe après la brève récréation. Tout le monde a ri, excepté le professeur, qui a saisi cette occasion pour dire à toute la classe que Spencer était en avance par rapport à tous les autres élèves de sa classe, et allait ainsi passer dans la classe supérieure avec les enfants de son âge 12. »
Après avoir terminé l’école primaire, Spencer est allé à l’Académie de Gila, que possédait l’Église. Là, il a obtenu de bons résultats, a fait du sport et a été dirigeant d’élèves.
Spencer a aussi acquis de l’expérience dans l’Église et a assisté à ses réunions d’une façon presque parfaite. Accomplir ses tâches de prêtrise était une priorité pour lui, comme l’illustre le récit suivant : « Les diacres devaient notamment harnacher les chevaux aux voitures chaque mois avant le jour de jeûne et aller de maison en maison pour collecter les offrandes de jeûne pour les pauvres de l’Église. Ensuite, ils portaient ce qu’ils avaient collecté à l’évêque : des bocaux de fruits, de la farine, des sirops, du miel et parfois environ un demi dollar en pièces. Andrew était si désireux que son fils apprenne son devoir que rien d’autre ne devait l’empêcher d’accomplir sa tâche ce jour-là. Le cheval et la voiture des Kimball n’étaient jamais trop occupés pour empêcher le collège des diacres de faire son travail. Si l’autre garçon désigné pour collecter les offrandes avec lui ne venait pas, Spencer y allait seul et accomplissait le travail 13. »
En plus de ses responsabilités à la maison, à l’école et à l’église, Spencer était le secrétaire de son père. Andrew écrivait de nombreuses lettres, en moyenne six par jour. Il les dictait à Spencer qui les tapait ensuite à la machine.
Ces expériences apprises tôt dans sa vie, ont appris à Spencer la valeur du travail, leçon qu’il a appliquée et enseignée pendant toute sa vie. Bien des années plus tard, alors qu’il était apôtre et âgé d’environ soixante-dix ans, certains jours, il se sentait physiquement épuisé. En parlant d’un de ces jours-là, il a écrit : « J’ai commencé cette journée, me sentant mal à l’aise et me demandant comment je pourrais aller jusqu’au bout, mais… mon travail m’a complètement absorbé, je n’ai plus pensé à moi et cela a été une bonne journée 14. »
Service missionnaire
En 1914, Spencer a terminé ses études à l’Académie de Gila ; il avait l’intention d’entrer à l’université d’Arizona à l’automne. Cependant, pendant la cérémonie de remise des diplômes, Andrew Kimball a annoncé que Spencer allait être appelé en mission.
Afin de se préparer à partir en mission, Spencer est allé travailler à Globe (Arizona), dans une laiterie. C’était la première fois qu’il quittait sa communauté de membres de l’Église de la vallée de la Gila. Il a découvert, que sans transiger sur ses principes, il pouvait s’adapter à la vie avec des gens qui ne suivaient pas totalement les mêmes que lui. Il a gagné le respect de ses collègues. À la fin de l’été, son patron qui fumait le cigare et n’était pas membre de l’Église a organisé une fête en son honneur et lui a offert une montre en or, gravée à son nom.
D’octobre 1914 à décembre 1916, Spencer a accompli une mission à plein temps dans les États du Centre, dont le siège était à Independence (Missouri). Son père, sa belle-mère et l’un de ses frères aînés avaient servi dans cette même région.
Le service à plein temps de frère Kimball dans le champ de la mission a été pour lui une période de progression. Il a dû faire face à des défis physiques. Son président de mission a demandé aux frères missionnaires de demander aux gens à qui ils prêchaient l’Évangile de les nourrir et de les loger. En conséquence, Frère Kimball a passé de nombreuses nuits mal à l’aise, dans de petites cabanes, dans des coins perdus du Missouri, partageant son lit avec des puces ou des punaises alors que des moustiques volaient autour de lui. Il a connu la faim à de nombreuses reprises et lorsqu’on lui proposait de la nourriture, il mangeait tout ce qu’on lui offrait.
Le porte à porte était un travail difficile qui donnait peu de résultats. Voici le récit d’une méthode inhabituelle employée par frère Kimball :
« Alors qu’il faisait du porte à porte à St Louis, il a remarqué un piano dans l’entrebâillement de la porte. Il a dit à la femme qui était sur le point de la refermer : ‘Vous avez un beau piano.’
« ‘Nous venons de l’acheter’ , a-t-elle répondu avec hésitation.
« ‘C’est un Kimball, n’est-ce pas? C’est aussi mon nom. Je pourrais vous jouer un chant qui vous plaira peut-être.’
« Surprise, elle a répondu : ‘Bien sûr, entrez.’
« Assis sur le banc, Spencer a joué et chanté : ‘O mon Père.
« Autant que Spencer l’ait su, elle ne s’est jamais jointe à l’Église, mais ce n’était pas faute d’avoir essayé 15. »
La mission de Spencer a renforcé ce que son éducation en Arizona avait déjà établi en lui : la foi au Seigneur, le dur labeur, la consécration, le service discret et le sacrifice.
Mariage et famille
Pendant l’été 1917, environ sept mois après son retour de mission, Spencer a remarqué une annonce dans le journal local. Camilla Eyring, qui avait emménagé avec sa famille dans la vallée de la Gila en 1912, allait enseigner l’économie familiale à l’Académie de Gila. En lisant et relisant l’article, Spencer a décidé qu’un jour il allait épouser Camilla Eyring. Par « coïncidence », il l’a rencontrée à l’arrêt d’autobus près de l’académie et a engagé la conversation. Il s’est assis à ses côtés dans l’autobus où ils ont continué à discuter et elle lui a permis de lui rendre visite chez elle.
Le jeune Spencer W. Kimball a beaucoup plu à la mère de Camilla. Elle l’invitait à dîner chaque fois qu’il rendait visite à Camilla. Frère Eyring, qui était très strict concernant les personnes que sa fille fréquentait, n’a pas élevé d’objections. 31 jours plus tard, Spencer passait le plus clair de son temps chez les Eyring. Les jeunes gens ont décidé de se marier, mais leurs projets ont été bousculés par la Première Guerre mondiale qui était en cours. Spencer a dû rester à Thatcher (Arizona) dans l’éventualité d’une mobilisation, ce qui les a empêchés de faire le long voyage au temple, en Utah. Ils se sont mariés civilement le 16 novembre 1917, mais ont attendu avec impatience leur scellement au temple. Ils ont atteint ce but au mois de juin suivant, au temple de Salt Lake.
Spencer et Camilla ont eu quatre enfants : trois garçons et une fille (Spencer LeVan, Andrew Eyring, Edward Lawrence et Olive Beth). Ils ont donné à leurs enfants non seulement leur amour et leur soutien, mais aussi leur confiance vis-à-vis de leurs décisions personnelles. Un de leurs fils a raconté plus tard :
« Quand nous les enfants participions à un spectacle à l’école, à l’Église ou ailleurs, mes parents y assistaient même s’ils devaient pour cela faire des sacrifices. Ils ont toujours montré leur intérêt et leur fierté à notre égard.
« Dans notre famille, un sentiment d’association et non de propriété, nous liait les uns aux autres. La responsabilité finale de nos actes reposait sur nous. Nos parents nous encourageaient et nous guidaient, mais ne nous commandaient pas. »
Ce même fils a ajouté à propos de son père :
« Je ne connais personne de plus généreux spirituellement que mon père. Il est gentil et prévenant, presque à l’excès. Les enfants ont tendance à considérer leurs parents comme des personnes ayant de l’autorité, qui ne sont pas sujettes aux besoins ordinaires. Mais je sais combien mon père apprécie un compliment sincère ou une parole d’appréciation. Et aucune expression d’appréciation ou marque d’affection ne compte pour lui davantage que celle venant de sa famille.
« Je sais que rien ne lui donne plus satisfaction, après avoir ressenti l’approbation du Seigneur, que de voir sa famille suivre son exemple pour essayer de mener une vie juste.
« Si je pouvais choisir la personne qui va me juger au dernier jour, je ne choisirais personne d’autre que mon père 16. »
Vie professionnelle, appels dans l’Église et service dans la collectivité
Avec Camilla à ses côtés et la perspective de responsabilités familiales à venir, Spencer a commencé sa vie professionnelle comme employé de banque. Au fil des années, il est passé du domaine de la banque à celui des assurances et de l’immobilier. Le bouleversement économique de la Grande Dépression (1929-1939) a durement affecté les affaires de Spencer mais sa famille a pu surmonter les difficultés.
Le père de Spencer est décédé en 1924, après avoir été président de pieu pendant près de trente ans. Quand Heber J. Grant, septième président de l’Église, a réorganisé la présidence du pieu du fait de ce décès, Spencer, âgé de vingt-neuf ans, a été appelé à servir comme deuxième conseiller.
En plus de sa vie de famille, de ses efforts professionnels et de son service dans l’Église, Spencer s’est activement investi dans la collectivité. Il a participé à la création de la première station de radio locale. Il a été membre du Rotary Club, organisation de service, dont il est devenu plus tard le gouverneur de district.
En 1938, le pieu de St Joseph a été divisé et Spencer a été appelé comme président du nouveau pieu de Mount Graham. Craignant que certaines personnes qu’il aurait à diriger aient de mauvais sentiments à son égard, Camilla et lui ont rendu visite à tous ceux qui pouvaient être dans ce cas, afin de régler le différend.17
En septembre 1941, pendant qu’il était président de pieu, une forte inondation s’est produite dans sa région. Des pluies incessantes ont fait monter le niveau de la rivière Gila qui a fini par se déverser dans les rues de certains villages. Des maisons et des fermes ont été emportées par les eaux. Les habitants, en majorité membres de l’Église, avaient désespérément besoin d’aide. Apprenant l’ampleur du désastre, Spencer a rempli sa voiture de nourriture prise dans les réserves de l’Église et est allé la porter dans les villes touchées par l’inondation. Il a pris des dispositions pour faire laver les vêtements sales. Il a aidé les fermiers à se procurer du grain pour nourrir leur bétail. Peu après un camion chargé de nourriture et de vêtements est arrivé. En l’espace d’une semaine, ceux qui avaient le plus souffert de l’inondation étaient sur la voie du retour à une situation normale. Les membres de l’Église ont fait preuve en cette occasion d’une générosité sans réserve. Spencer a dirigé l’estimation des besoins et la distribution des ressources. Dans toute cette affaire, il est resté en contact étroit avec Harold B. Lee, du Collège des douze apôtres, dont les responsabilités comprenaient le programme d’entraide.
L’apostolat
Le 8 juillet 1943, J. Reuben Clark, fils, membre de la Première Présidence, a téléphoné à Spencer chez lui, pour lui dire qu’il avait été appelé pour remplir l’une des deux vacances au Collège des douze apôtres. Spencer lui a répondu : « Oh, frère Clark! Pas moi? Vous ne voulez pas dire moi? Il doit y avoir une erreur. J’ai dû mal comprendre… Cela semble tellement impossible. Je suis si faible, petit, limité et incapable 18. » Spencer a assuré le président Clark qu’il ne pouvait y avoir qu’une réponse à un appel du Seigneur, mais sa volonté de servir n’a pas suffi à surmonter immédiatement ses sentiments d’incapacité et d’indignité.
Ces sentiments se sont intensifiés dans les jours qui ont suivi, au cours desquels Spencer n’a quasiment pas dormi. Alors qu’il rendait visite à son fils à Boulder (Colorado), un matin de bonne heure, il est allé marcher dans les collines. Tout en grimpant de plus en plus haut, il a réfléchi à la portée de l’appel apostolique. La pensée de ne pas être à la hauteur, que son appel ait pu être une erreur, le tourmentait. C’est dans cet état d’esprit qu’il est arrivé au sommet de la montagne et qu’il s’est agenouillé pour prier et méditer. Il a raconté plus tard : « Comme j’ai prié! Comme j’ai souffert! Comme j’ai pleuré! Comme j’ai lutté! » Pendant qu’il se tourmentait ainsi, la pensée de son grand-père Heber C. Kimball et de « la grande œuvre qu’il avait faite » lui est venue à l’esprit. Cette prise de conscience a calmé le cœur de Spencer. Il a raconté : « Une grande assurance m’a envahi, je n’ai plus eu de doute ni d’incertitude. C’était comme si l’on m’avait enlevé un grand fardeau. Je me suis assis, silencieux et tranquille, et ai contemplé la belle vallée, remerciant le Seigneur d’avoir répondu à mes prières19. » Le 7 octobre 1943, à l’âge de 48 ans, Spencer W. Kimball a été ordonné apôtre.
Frère Kimball a servi au sein du Collège des douze pendant trente ans. Pendant cette période il a beaucoup voyagé pour fortifier les membres et contribuer à la croissance du royaume. George Albert Smith lui ayant particulièrement confié cette tâche, frère Kimball s’est particulièrement intéressé aux descendants du prophète Léhi du Livre de Mormon, les peuples autochtones d’Amérique du nord, d’Amérique centrale et d’Amérique du sud. Il a défendu leurs intérêts avec éloquence, à la fois dans les conseils dirigeants de l’Église et parmi les membres en général. Il a dénoncé tous les préjugés raciaux ainsi que l’oppression des pauvres.
Dans ses discours, frère Kimball pouvait aussi bien être poétique que parler sans détour. Il parlait souvent de sujets délicats touchant les membres moyens de l’Église. En plus de nombreux discours, il a écrit Le miracle du pardon. Ce livre est né de la longue expérience d’apôtre de frère Kimball, acquise en conseillant les qui avaient commis de graves transgressions. Dans son livre, il a souligné ce que le Seigneur attend de nous, notre potentiel divin ainsi que le chemin que nous devons suivre pour nous repentir et obtenir l’assurance du pardon divin complet. Frère Kimball a rendu témoignage au lecteur que le Seigneur est miséricordieux et pardonnera aux gens qui se repentent sincèrement.
Problèmes de santé
Au cours de sa vie, Spencer W. Kimball a eu diverses blessures et maladies. Deux problèmes de santé majeurs ont grandement affecté les années où il a été apôtre. Sa première maladie a laissé sur lui une marque durable, apparente chaque fois qu’il parlait. À la fin de 1956, il a perçu un enrouement dans sa voix. On a diagnostiqué un cancer de la gorge. En juillet 1957, il a subi l’ablation d’une corde vocale et demie. Par la suite, il a reposé sa voix afin de permettre la meilleure guérison possible. Pendant ses nombreuses nuits sans sommeil, frère Kimball s’est demandé s’il reparlerait jamais.
Six mois après l’opération, les médecins ont déclaré que la gorge de frère Kimball était guérie. Boyd K. Packer, du Collège des douze apôtres, raconte comment frère Kimball a eu recours à l’humour pour présenter sa nouvelle voix à ses auditeurs :
« Puis est venue l’épreuve. Pouvait-il parler? Pouvait-il prêcher?
« Il est rentré chez lui [en Arizona] pour son premier discours… Là, lors d’une conférence du pieu de St Joseph… il s’est tenu en chaire.
« ‘Je suis revenu ici’, a-t-il dit, ‘pour être parmi les miens. C’est dans cette vallée, que j’ai été président de pieu.’ Peut-être pensait-il que, s’il échouait, il serait parmi les gens qui l’aimaient le plus et qu’ils comprendraient.
« Il y a eu un grand déversement d’amour. La tension de cet instant dramatique est tombée quand il a ajouté : ‘Je dois vous dire ce qui m’est arrivé. Je suis allé dans l’Est, et là-bas, je suis tombé dans un coupe-gorge…’ Après cela, ce qu’il a dit n’avait pas d’importance. Frère Kimball était de retour 20! »
Sa nouvelle voix était douce, profonde et rocailleuse. C’était, selon frère Packer : « une voix calme, persuasive, douce, une voix acquise, une voix attirante, une voix… qu’aimaient les membres de l’Église 21. »
Frère Kimball a également eu de graves problèmes cardiaques. Après être devenu apôtre, il a eu plusieurs crises cardiaques. En 1972, alors qu’il était président suppléant du Collège des douze, il a subi une grave opération. Russell M. Nelson était le chirurgien de frère Kimball à l’époque. Plus tard, alors qu’il était membre du Collège des douze apôtres, frère Nelson a raconté ce qui s’était passé pendant l’opération : « Je n’oublierai jamais ce que j’ai ressenti quand son cœur s’est remis à battre, avec puissance et vigueur. À ce moment précis, l’Esprit m’a fait savoir que ce malade particulier allait vivre pour devenir le prophète de Dieu sur la terre 22. »
Président de l’Église
Dans la nuit du 26 décembre 1973, Harold B. Lee, onzième président de l’Église, est mort subitement. Conformément à l’ordre de succession apostolique dans l’Église, le 30 décembre 1973, Spencer W. Kimball, en tant que plus ancien membre du Collège des douze, est devenu président de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.
Cet appel a surpris les membres de l’Église, spécialement le président Kimball. Il avait été ordonné apôtre deux ans et demi après Harold B. Lee. Du fait que le président Kimball avait quatre ans de plus que le président Lee et, semblait en plus mauvaise santé, il était convaincu qu’il ne vivrait pas assez longtemps pour succéder au président Lee. Comme il l’a dit plus tard : « J’étais absolument certain que, le temps venu, j’allais mourir président des douze… J’ai dit, lors des funérailles du président Lee, que personne n’a prié plus fort que sœur Kimball et moi pour qu’il guérisse quand il a été malade et pour qu’il continue à aller bien quand il était en bonne santé 23. »
Le président Kimball a été soutenu par les membres de l’Église à la conférence générale d’avril 1974. Il n’avait pas aspiré à obtenir ce poste, mais le Seigneur l’avait choisi pour être son prophète, voyant et révélateur et pour diriger son Église et son royaume sur la terre.
À l’occasion de cette conférence générale d’avril, le président Kimball a fait un discours sur l’oeuvre missionnaire lors d’une réunion de dirigeants de l’Église. William Grant Bangerter, qui est devenu plus tard membre de la présidence des soixante-dix, était représentant régional à l’époque et était présent à cette réunion. Il a rappelé plus tard l’impact des paroles du président Kimball :
« Nous nous sommes rendus compte que le président Kimball nous ouvrait des fenêtres spirituelles et nous faisait signe de venir contempler avec lui les plans de l’éternité. C’était comme s’il repoussait les rideaux qui recouvraient les desseins du Tout-Puissant et nous invitait à contempler avec lui le destin de l’Évangile et la vision de son ministère.
« Je doute que quiconque parmi les personnes présentes oublie ce qui s’est passé. Moi-même, je n’ai plus relu le discours du président depuis lors, mais la substance de ce qu’il a dit s’est si fortement imprimée dans mon esprit que je pourrais répéter maintenant même par cœur la plupart de ce qu’il a dit.
« L’Esprit du Seigneur était sur le président Kimball et il est passé de lui à nous comme une présence tangible qui était à la fois émouvante et percutante. Il a déployé une vision glorieuse devant nos yeux 24. »
Le discours du président Kimball à cette occasion annonçait un point marquant de son ministère de président de l’Église :
« Mes frères, je me demande si nous faisons tout ce que nous pouvons. Sommes-nous satisfaits de la façon dont nous instruisons le monde entier? Cela fait maintenant cent quarante-quatre ans que nous faisons du prosélytisme. Sommes-nous prêts à allonger la foulée? À élargir notre perspective?…
« Je ne me fais aucune illusion, frères, je ne pense pas que ce sera chose facile, qui ne demandera pas d’efforts ou pourra être accomplie du jour au lendemain, mais je crois que nous pouvons avancer et nous accroître bien plus vite que nous ne le faisons à présent…
« … Je pense que, si nous sommes tous d’un seul cœur et d’un seul esprit, et avons le même but, nous pouvons avancer et changer l’image que nous avons et qui semble être que « nous ne nous débrouillons pas si mal ». Ne faisons pas ‘couler le bateau’ 25. »
C’est ainsi qu’ont débuté dix années remarquables de croissance et de changement. Bien que l’oeuvre missionnaire ait été le point de départ, il est bientôt devenu évident pour les membres de l’Église que le président Kimball n’avait pas l’intention de rester immobile dans quelque domaine d’effort juste que ce soit.
Oeuvre missionnaire
Le président Kimball s’est efforcé d’ouvrir les portes des pays à la proclamation de l’Évangile. Les divisions issues de ce qu’on a appelé la « guerre froide » entre les gouvernements démocratiques et communistes empêchaient tout prosélytisme dans bien des pays d’Europe et d’Asie. La politique de l’Église concernant l’ordination à la prêtrise limitait aussi les efforts missionnaires en Afrique, dans certaines parties d’Amérique du sud et dans les Antilles. Le président Kimball a recherché toutes les occasions d’étendre géographiquement l’Église.
Au même moment, il a insisté sur le fait que de plus grandes occasions d’enseigner l’Évangile aux nations dépendaient de la volonté des membres de l’Église de les saisir. Pour les jeunes gens dignes et bien préparés, le service missionnaire ne devait pas être considéré comme un choix mais comme un devoir et une occasion sacrés. Cette obligation concernait tous les jeunes gens, où qu’ils se trouvent. Les jeunes filles pouvaient faire une mission, mais n’étaient pas soumises à la même obligation que les jeunes gens. De plus, les couples d’âge mûr étaient encouragés à se joindre à la force missionnaire. Au début de la présidence de Spencer W. Kimball, dix-sept mille missionnaires à plein temps servaient de par le monde. Quand il est mort environ douze ans plus tard, le nombre de missionnaires avait presque atteint trente mille. L’accroissement des efforts missionnaires a produit des fruits substantiels : Le nombre de membres de l’Église est passé de 3,3 millions à près de 6 millions.
En 1975, s’adressant à un groupe de jeunes membres de l’Église, le président Kimball a dit : « Savez-vous ce que le Seigneur a fait pour vous, jeunes gens? Vous êtes de beaux jeunes hommes. Vous avez l’air fort, en bonne santé et heureux. Qui vous a donné votre santé? Qui vous a donné vos yeux? Qui vous a donné vos oreilles? Qui vous a donné votre voix? Y avez-vous jamais pensé? Quelqu’un vous a forcément fourni ces dons inestimables. »
Il leur a alors parlé de son opération de la gorge qui ne lui avait laissé qu’une partie de sa voix. Il leur a dit ensuite : « Qui d’entre vous serait disposé à abandonner sa voix? L’avez-vous achetée ou acquise d’une autre façon? Quelqu’un vous l’a-t-il donnée? Le Seigneur vous a-t-il donné une voix pour que vous puissiez vous exprimer? Alors pourquoi n’allez-vous pas de par le monde raconter la plus grande histoire du monde, dire aux gens que la vérité a été rétablie, que le Seigneur a suscité des prophètes depuis Adam jusqu’à maintenant, que vous-mêmes avez la sainte prêtrise et que vous allez la magnifier tous les jours de votre vie? Dites cela au monde! Il en a besoin!
« Je vous le demande à nouveau : qui vous a donné votre voix? Pourquoi? Seulement pour que vous puissiez chanter, parler ou vous amuser avec ceux qui vous entourent? Ou bien vous a-t-il donné cette voix pour que vous puissiez enseigner l’Évangile?…
« Et bien je pense que nous ferions mieux d’aller dans le champs de la mission, Vous ne croyez pas ? Chaque jeune homme qui en est digne 26. »
Œuvre du temple
En tant que président de l’Église, Spencer W. Kimball a supervisé une augmentation importante de la construction de temples. Au début de sa présidence, quinze temples étaient en service. Quand il est décédé une douzaine d’années plus tard, il y en avait trente-six, soit plus du double. Gordon B. Hinckley, deuxième conseiller dans la Première Présidence, a témoigné : « Ce grand élan dans la construction des temples a été donné par le président Kimball sous la révélation du Seigneur 27. »
Concernant l’œuvre du temple, le président Kimball a dit : « Le temps vient et n’est pas très éloigné où tous les temples sur cette terre fonctionneront nuit et jour… Il y aura un régiment de servants qui œuvreront nuit et jour presque jusqu’à l’épuisement, en raison de l’importance du travail et du grand nombre de personnes qui reposent dans l’éternité, qui désirent ardemment les bénédictions qui peuvent leur être données et en ont besoin 28. »
Gouvernement de l’Église
En 1975 et 1976, le président Kimball a dirigé la réorganisation et l’expansion du gouvernement de l’Église afin de suivre le rythme de la croissance de l’Église. Dans le cadre du développement de l’organisation et des responsabilités des Autorités Générales, le premier collège des soixante-dix a été reconstitué et en octobre 1976 il comptait trente-neuf membres. « Avec cette décision, a expliqué le président Kimball, les trois collèges dirigeants de l’Église définis par les révélations, la Première présidence, le Collège des douze apôtres et le premier collège des soixante-dix, ont été mis en place comme le Seigneur l’a révélé. Cela va permettre de gérer efficacement la lourde charge de travail présente et de se préparer à l’augmentation croissante et à l’accélération de l’œuvre, en prévision du jour où le Seigneur reviendra pour diriger son Église et son royaume 29. » Cette révélation du Seigneur à son prophète a depuis mené à d’autres changements dans le gouvernement de l’Église comme l’a nécessité « l’œuvre de la vigne » (D&A 107:96).
Écritures
En 1976, le président Kimball a demandé que deux révélations, l’une au prophète Joseph Smith, l’autre à Joseph F. Smith, soient ajoutées au canon des Écritures (voir D&A 137 et 138). Sous la direction du président Kimball, une édition de l’Église de la Bible du roi Jacques a été publiée en 1979 et une nouvelle édition du triptyque (le Livre de Mormon, les Doctrine et Alliances et la Perle de Grand Prix) a été publiée en 1981. Parlant de la parution de ces éditions des ouvrages canoniques, Boyd K. Packer a dit : « Au fil des générations, celle-ci sera considérée, avec le recul de l’histoire, comme le couronnement du ministère du président Kimball 30. »
Pendant la présidence de frère Kimball, les Écritures sont aussi devenues le fondement du programme de l’École du dimanche de l’Église.
Simplification
Comme la taille et la sphère d’influence de l’Église augmentaient, le président Kimball et d’autres dirigeants de l’Église ont pris conscience de la nécessité de simplifier les différents programmes de l’Église afin que ce qui était essentiel soit plus facilement disponible sous une certaine forme aussi bien pour les membres qui appartenaient aux branches de l’Église les plus récentes que pour ceux qui étaient dans des paroisses établies depuis longtemps. Le président Kimball a dit :
« La mission de l’Église vis-à-vis de ses membres est de mettre à leur disposition les principes, les programmes et la prêtrise qui leur permettront de se préparer pour l’exaltation. Notre succès, aussi bien sur le plan privé que sur celui de l’Église, sera déterminé en grande partie par la fidélité avec laquelle nous nous appliquons à vivre l’Évangile au foyer. Ce n’est qu’en voyant clairement les responsabilités de chacun et le rôle des familles et des foyers que nous pourrons convenablement comprendre que les collèges de la prêtrise et les organisations auxiliaires, et même les paroisses et les pieux, existent avant tout pour aider les membres à vivre l’Évangile au foyer. Alors, nous pourrons comprendre que les gens sont plus importants que les programmes et que les programmes de l’Église doivent toujours soutenir les activités de la famille centrées sur l’Évangile et non les gêner…
« Notre engagement de vivre l’Évangile en le centrant sur le foyer doit devenir le message clairement exprimé de chaque programme de la prêtrise et d’auxiliaire, réduisant, lorsque c’est nécessaire, certaines des activités facultatives qui peuvent empêcher de se concentrer comme il se doit sur la famille et le foyer 31 »
Un changement important qui a eu lieu pendant la présidence de Spencer W. Kimball a été l’introduction de l’horaire groupé de trois heures de réunions le dimanche. Celui-ci a combiné les différentes réunions de la semaine et du dimanche en un bloc simple et plus pratique de réunions groupées le dimanche. L’instauration de cet horaire groupé en 1980 a beaucoup réduit les dépenses de temps et d’argent des membres de l’Église de façon à ce qu’ils puissent participer à tout le programme du Seigneur.
Révélation sur la prêtrise
L’un des changements les plus importants intervenus au cours de la présidence de Spencer W. Kimball a été la révélation sur la prêtrise (voir Déclaration Officielle 2 dans les Doctrine et Alliances).
Le premier juin 1978, le président Kimball ainsi que d’autres membres de la Première Présidence et du Collège des douze apôtres se sont réunis dans une salle haute du temple de Salt Lake. Le président Hinckley, qui était présent en tant que membre du Collège des douze apôtres, a raconté par la suite :
« La question d’accorder les bénédictions de la prêtrise aux noirs était présente à l’esprit de beaucoup des Frères depuis plusieurs années. Plusieurs fois, des présidents de l’Église l’avaient mise à l’ordre du jour. C’était devenu un sujet particulièrement important pour le président Kimball.
« Depuis très longtemps, il priait concernant cette question sérieuse et difficile. Il avait passé de nombreuses heures dans cette salle haute du temple, seul, en prière et en méditation.
« À cette occasion, il a abordé la question devant les Frères : ses conseillers et les apôtres. Après en avoir discuté, nous nous sommes unis en prière en cette circonstance des plus sacrées. Le président Kimball lui-même a fait cette prière… L’Esprit de Dieu était là. Et par le pouvoir du Saint-Esprit a été donnée à ce prophète l’assurance que la chose pour laquelle il priait était juste, que le temps était venu et qu’à présent les merveilleuses bénédictions de la prêtrise devaient être accordées aux hommes dignes partout, quel que soit leur lignage.
« Par le pouvoir du Saint-Esprit, chaque homme dans ce cercle a su la même chose.
« Cela a été un moment paisible et sublime…
« … Aucun de nous qui étions présents à cette occasion n’a plus jamais été tout à fait le même après cela. L’Église n’a plus non plus été tout à fait la même 32. »
L’annonce de la révélation a été faite sous la forme d’une lettre datée du 8 juin 1978, adressée à tous les officiers de la prêtrise généraux et locaux de l’Église : « Tous les hommes fidèles et dignes de l’Église pourront recevoir la Sainte Prêtrise, avec le pouvoir d’exercer son autorité divine et de jouir avec leur famille de toutes les bénédictions qui en découlent, notamment les bénédictions du temple « (D&A Déclaration Officielle 2).
Le président Hinckley a raconté : « La lettre a été envoyée à l’Église et au monde. Je n’ai pas besoin de vous dire l’effet électrisant qu’elle a produit dans l’Église et au dehors. Il y a eu beaucoup de larmes de gratitude non seulement de ceux qui auparavant n’avaient pu recevoir la prêtrise et qui sont devenus les bénéficiaires immédiats de cette annonce, mais aussi d’hommes et de femmes de l’Église partout dans le monde qui avaient ressenti la même chose que nous, concernant ce sujet 33. »
Environ trois mois plus tard, le président Kimball a déclaré, à propos de cette révélation : « L’un des Frères a dit hier qu’il vient d’arriver l’un des plus grands changements et l’une des plus grandes bénédictions qui se soient jamais produits… Hormis quelques personnes qui veulent toujours être contre, les gens du monde entier ont accepté ce changement avec gratitude… Nous en sommes donc très, très heureux, particulièrement pour ceux qui étaient privés de ces bénédictions auparavant 34. »
Amour pour les gens et pour l’œuvre du Seigneur
Décrivant le président Kimball, Neal A. Maxwell, du Collège des douze apôtres, a dit : « Le ministère de cet homme était empreint d’une chaleur contagieuse. Son regard aimant et pénétrant, son étreinte, son saint baiser, sa tendresse, ressentis par tant de gens, créaient une aura méritée autour de cet homme, qui ne le rendait pas inabordable, mais lui conférait une chaleur toute particulière. Son amour s’adressait à chacun ; personne ne se sentait jamais oublié. Chaque Autorité générale pouvait penser qu’il était le préféré du président Kimball, car il aimait tant chacun de nous! Comment pouvait-on penser autrement 35 ? »
Le président Kimball a dit aux membres de l’Église : « J’aimerais que l’on me connaisse comme étant quelqu’un qui aime ses frères et sœurs 36. » Les membres de l’Église ressentaient et exprimaient de l’amour envers lui en retour, ce dont il était reconnaissant. Il disait : « Quand les gens me disent qu’ils m’aiment, je leur dis toujours : ‘C’est merveilleux, parce que c’est ce qui m’aide à vivre.’ Et je le pense littéralement 37. »
De sa façon aimante mais déterminée, le président Kimball exhortait les membres de l’Église à se consacrer davantage au service du Seigneur, en surmontant l’autosatisfaction, le péché ou d’autres problèmes qui les empêchaient d’aller de l’avant. Par sa vie personnelle, il donnait l’exemple de quelqu’un qui allait de l’avant au service du Seigneur, quels que soient les obstacles.
Robert D. Hales, alors membre du premier collège des soixante-dix, a dit du président Kimball : « C’est un homme d’action, comme le démontre cet écriteau simple sur son bureau : ‘Agissez.’ … Par son exemple et son amour il motive les gens qui le suivent à atteindre des buts plus élevés et à allonger la foulée vers la perfection 38. »
Dans un discours donné à la conférence générale d’octobre 1979, le président Kimball a raconté l’histoire de Caleb, dans l’Ancien Testament, qui, confronté aux difficultés liées à l’entrée dans la terre promise, a dit : « Donne-moi donc cette montagne » (Josué 14:12). Se référant à ces paroles, le président Kimball a dit :
« C’est ce que j’éprouve pour l’œuvre en ce moment. Il y a de grandes difficultés devant nous, d’immenses possibilités à saisir. Je suis heureux de cette perspective passionnante et j’ai envie de dire au Seigneur, humblement: ‘Donne-moi donc cette montagne’, donne-moi ces difficultés.
« Humblement, je fais cette promesse au Seigneur et à vous, mes frères et sœurs bien-aimés, mes compagnons de travail dans cette œuvre sacrée du Christ : Je vais aller de l’avant, avec foi dans le Dieu d’Israël, sachant qu’il nous guidera, nous dirigera, et nous conduira finalement à l’accomplissement de ses desseins, à notre terre de promission et aux bénédictions qui nous ont été promises…
« Instamment et avec ferveur, j’incite chacun de vous à faire cette même promesse et ce même effort : chaque détenteur de la prêtrise, chaque femme en Israël, chaque jeune homme, chaque jeune fille, chaque garçon et chaque fillette 39. »
Le 5 novembre 1985, après près de douze années de service en tant que président de l’Église, Spencer W. Kimball est décédé. Au moment de sa mort, son conseiller, Gordon B. Hinckley a déclaré : « J’ai eu le grand privilège et la possibilité de travailler aux côtés du président Kimball pour accomplir l’œuvre du Seigneur. Une fois, j’ai essayé de le ralentir un peu et il m’a dit : ‘Gordon, ma vie est comme mes chaussures : elle est faite pour être usée dans le service.’ Il a vécu ainsi. Il est mort ainsi. Il est parti pour rejoindre celui dont il était le serviteur, le Seigneur Jésus-Christ, dont il a témoigné 40. »