Prendre un soin spécial de sa famille
«Parents et grands-parents, je vous demande d’étudier votre emploi du temps et vos priorités afin de vous assurer que les relations les plus importantes bénéficient de plus de temps!»
Pendant ces derniers jours où «tout sera en commotion» (D&A 88:91), l’Evangile rétabli de Jésus-Christ nous apporte beaucoup de choses essentielles, en particulier une précieuse compréhension, qui nous permet de voir les «choses telles qu’elles sont en réalité» (Jacob 4:13).
L’éminent historien Will Durant a parlé du besoin de l’homme de saisir la valeur et la perspective des choses fugaces, disant: «Nous voulons savoir que les petites choses sont petites et que les grandes sont grandes, avant qu’il soit trop tard; nous voulons voir les choses aujourd’hui telles qu’elles paraîtront pour toujours ‹à la lumière de l’éternité›» (Will Durant, The Story of Philosophy, p. 1).
La perspective plus large de l’Evangile éclaire le rôle de la famille.
Avant de citer certaines des difficultés de la vie familiale, considérons, mes frères et sœurs, le manque fonctionnel de perspective dont on souffre quand on vit sans Dieu dans le monde. S’il n’y avait pas de vérités éternelles, par quels principes les mortels pourraient-ils se laisser guider? Si nous ne sommes pas responsables devant Dieu, devant qui sommes-nous responsables? De plus, si rien n’est vraiment jamais mal, alors personne n’est jamais vraiment responsable. S’il n’y a pas de limites fixées, alors il ne peut y avoir d’excès. Pourquoi serions-nous surpris des résultats troublants, parmi lesquels le manque de civisme, quand chacun fait «ce qui lui semble bon» et ne recherche «pas le Seigneur afin d’établir sa justice», mais «fait ce qui lui plaît» (Juges 17:6; 21:25; voir aussi D&A 1:16).
Réfléchissez, par exemple, au peu de cas que beaucoup font des dix commandements. Aujourd’hui, l’homicide, le vol et le faux témoignage attirent encore une certaine condamnation par la société et certaines sanctions pénales, mais la transgression sexuelle, la profanation du sabbat, le non-respect des parents, et l’emploi en vain du nom du Seigneur ne sont absolument plus punis par la loi. Ce déclin est en partie la conséquence amère du relativisme en matière de morale, philosophie de prédilection de beaucoup, qui reflète non pas des vérités fixes et divines, mais les us du moment. Il n’est pas étonnant que Ortega Y. Gasset ait fait une mise en garde judicieuse: «Si la vérité n’existe pas, le relativisme ne peut pas être pris au sérieux» (Ortega Y. Gasset, J., The Modern Theme, New York, Harper and Row, 1961, cité dans Duncan William, Trousered Apes, New Rochelle, N. Y., Arlington House, 1971, p. 69).
Notez les tendances terribles qui, si on n’y apporte pas de correction, entraîneront des conséquence pires encore:
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Dans dix ans, la moitié des enfants nés en Amérique seront illégitimes (Bill Clinton, Discours sur l’Etat de l’Union, CNN Specials, 25 janv. 1994, p. 3).
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De plus en plus d’enfants n’ont pas de père au foyer, et, chiffre presque incroyable, soixante-dix pour cent des délinquants juvéniles viennent de foyers sans père (Wall Street Journal, 18 nov. 1993, p. A-20).
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Moins de la moitié des enfants qui naissent aujourd’hui habiteront constamment avec leur mère ou leur père pendant toute leur enfance (Barbara Dafoe Whitehead, Atlantic Monthly, avril 1993, p. 47).
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Un quart de tous les adolescents attrapent une maladie vénérienne avant la fin de leurs études secondaires (Research Briefs from Utah Foundation, 16 juillet 1993, p. 1).
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Cinquante-cinq pour cent des enfants américains de moins de six ans ont leurs deux parents ou leur unique parent qui travaille (Research Briefs, p. 1).
Le patriarche Léhi a dit de lui-même qu’il était un «père tremblant» (2 Néphi 1:14). Il y a aujourd’hui des parents et des grands-parents tremblants! Certaines des familles d’aujourd’hui vivent dans un désert pire que celui de Léhi. Les bonnes familles sont une espèce en voie de disparition et nécessiteront peut-être un jour des mesures de protection comme le grand duc.
Moins les parents remplissent leur rôle, plus le besoin de policiers augmente. On manquera toujours de policiers tant qu’on manquera de bons parents! De même il n’y aura pas assez de prisons s’il n’y a pas assez de bons foyers.
Comme nous le savons tous, on parle beaucoup de valeurs familiales, mais ce ne sont pas les mots qui feront changer les choses. Avec nostalgie, beaucoup regrettent la famille d’autrefois; ils considèrent le déclin de la famille comme regrettable mais irréversible. D’autres, sincèrement inquiets du flot de conséquences sociales, empilent des sacs de sable en aval, bien que l’emploi frénétique de sacs de sable détruise souvent ce qui reste des jardins familiaux. Certains considèrent la famille comme une institution à redéfinir totalement ou même dont il faut se débarrasser.
Il n’y a pas de familles parfaites, ni dans le monde, ni dans l’Eglise, mais il y a beaucoup de bonnes familles. Je rends également hommage aux parents héroïques, seuls à la suite d’un décès ou d’un divorce, qui s’efforcent avec amour et droiture d’élever leurs enfants, souvent malgré de grandes difficultés.
Hélas, dans certaines familles les choses vont très mal, mais ces graves échecs ne sont pas une raison pour mépriser l’institution qu’est la famille. Il faut corriger le cap et colmater les brèches, pas abandonner le navire!
Beaucoup du désespoir et de la violence d’aujourd’hui est le résultat d’attitudes malsaines à l’égard de toute autorité, y compris au sein de la famille. Il y a trente-cinq ans, un commentateur de la BBC, a fait part de ses inquiétudes avec beaucoup de perception: « … Nous produisons des adultes qui ont une attitude encore moins claire et cohérente que nous vis-à-vis de l’autorité, et qui seront encore moins capables que leurs parents de donner à leurs enfants une attitude saine vis-à-vis de l’autorité. Ainsi, il peut se créer une réaction en chaine insidieuse, qui prendra une force terrible, de génération en génération» (cité dans The Listener, 12 février 1959).
La «force terrible» s’accroît avec l’apparition de profonds changements sociaux et politiques en peu d’années (voir Moroni 9:12).
Malheureusement, il est plus facile de chanter les louanges de la famille que de créer une famille heureuse. Il est plus facile de parler, comme je le fais, de valeurs familiales, que d’appliquer ces valeurs. Il est plus facile de se réjouir de nos beaux souvenirs de notre bonne famille que de donner à la génération montante ses beaux souvenirs à elle.
La doctrine pure et dure exige cependant que nous posions des questions dures. Comment un pays peut-il encourager les valeurs familiales sans mettre en valeur et sans protéger de manière cohérente la famille dans sa politique? Et comment peut-on mettre la famille en valeur sans mettre en valeur le rôle des parents? Comment peut-on mettre les parents en valeur sans mettre le mariage en valeur? Comment peut-il y avoir de l’amour au foyer s’il n’y a pas d’amour dans le mariage? Tant de tentations égoïstes éloignent le père et la mère l’un de l’autre et de leurs enfants.
Le rétablissement de l’Evangile met énormément l’accent sur des principes fondamentaux relatifs à la famille, entre autres sur le scellement de familles éternelles. En tant que saints des derniers jours nous ne pouvons donc que prendre position chaque fois qu’il s’agit de la famille, même si nous sommes incompris, mal vus ou méprisés.
Après tout, la famille mortelle est apparue avant les nations, et les familles continueront d’exister après que le Tout-Puissant aura «mis complètement fin à toutes les nations» (D&A 87:6). Pour les saints des derniers jours, bien qu’il faille le faire à la manière du Seigneur, chaque année doit être l’année de la famille. Cependant, les saints des derniers jours doivent faire mieux dans leur famille, beaucoup mieux! Nous devons exprimer moins de critique et plus d’amour dans notre famille.
De toute l’œuvre de perfectionnement des saints, rien ne se compare à ce qui est accompli dans les bonnes familles. David O. McKay a enseigné que «le foyer est la base de la droiture, et que rien ne peut le remplacer ni remplir son rôle essentiel» (Improvement Era, janv. 1962, p. 36). Parfois, inintentionnellement, certaines activités de l’Eglise hors programme, organisées avec un manque de sensibilité, peuvent nuire à la vie familiale.
Il est intéressant de noter qu’après avoir donné des enseignements aux Néphites, Jésus a dit: «Retournez chez vous et méditez les choses que je vous ai dites» et priez et préparez-vous «pour demain» (3 Néphi 17:3). Jésus n’a pas dit: «Allez à vos clubs civiques, à vos réunions en ville ni même à vos centres de pieu.»
Remplir ses devoirs de famille inclut aussi apprendre à nos enfants «à comprendre la doctrine de la repentance, de la foi au Christ, le Fils du Dieu vivant» (D&A 68:25). Cette vision du rôle des parents est bien différente de celle du monde. Marie Winn, parlant des «enfants qui n’ont pas d’enfance», a relevé «une tendance injustifiée à traiter les enfants comme s’ils avaient la capacité de vivre toutes les expériences de la vie adulte» (Marie Winn, Children without Childhood, New York, Penguin, 1983, p. 5).
Peut-être ne pouvons-nous pas changer les tendances générales, mais nous pouvons refuser de les suivre.
Si les parents ne transmettent pas leur témoignage et leurs croyances en plus des valeurs humaines, leur famille ne tardera pas à connaître un grave déclin spirituel, ayant perdu sa saveur. La loi de la moisson n’est nulle part plus évidente et plus implacable que dans les jardins familiaux!
En plus de la «sociabilité» aimante qui, un jour, «sera accompagnée de gloire éternelle», nous préconisons la prière en famille, la soirée familiale et l’étude des Ecritures en famille (voir D&A 130:2). De plus, la révélation personnelle concernant la façon d’élever les enfants peut constituer une source unique de direction et de certitude personnalisées! Appliquer des remèdes fondamentaux prendra du temps et réparera pas tout immédiatement. Que pourrait-il y avoir de plus fondamental, cependant, que «l’amour au foyer» quand annuellement, en Amérique, il y a quatre millions de plaintes de violences domestiques, presque autant que le nombre de naissance aux Etats-Unis (Deseret News, 20 janv. 1994, p. A1). Nous avons besoin de plus de mères qui connaissent la vérité, et d’enfants qui ne doutent pas que leur mère la connaisse (voir Alma 56:48). Mes enfants et mes petits-enfants ont la bénédiction d’avoir une telle mère et grand-mère. Nous avons besoin de plus de pères gentils et attentifs qui soient aussi investis de l’autorité de l’exemple. Plus de parents doivent laisser le même souvenir qu’un prophète a laissé à sa fille, Helen Lee Goates, qui a écrit: «Un père qui était ferme mais gentil, et une mère qui était gentille mais ferme» (That my Family Should Partake, Salt Lake City, Deseret Book Co., 1974, p. 56).
Dans une bonne famille, nous pouvons tout d’abord apprendre à écouter, à pardonner, à faire des compliments, et à nous réjouir de la réussite des autres. Nous pouvons aussi y apprendre à maîtriser notre égoïsme, à travailler, à nous repentir et à aimer. Dans les famillées dotées de perspective spirituelle, il n’est pas nécessaire que nos erreurs passées grèvent notre avenir. S’il nous arrive de mal tenir notre rôle, notre famille aimante sait que pour nous la pièce n’est pas finie, que le rideau n’est pas définitivement tombé.
Pour certains, ces remèdes semblent trop simples pour guérir notre société qui souffre de tant de maux. Dans l’Israël affligé de l’antiquité, certains dédaignèrent eux aussi les remèdes simples donnés par Dieu, et ils périrent (voir 1 Néphi 17:41).
Il est évident que les valeurs familiales sont le reflet de nos priorités personnelles. Etant donné la gravité de la situation actuelle, les parents seraient-ils prêts à renoncer à une chose extérieure au foyer, et à consacrer ce temps et ce talent à leur famille? Parents et grands-parents, je vous demande d’étudier votre emploi du temps et vos priorités afin de vous assurer que les relations les plus importantes bénéficient de plus de temps! Brigham Young, qui était pourtant dévoué à sa famille s’entendit dire par le Seigneur qu’il devait prendre un soin spécial de sa famille (voir D&A 126:3). Ce sont parfois les gens les plus consciencieux qui ont le plus besoin de ce message!
La société doit de nouveau concentrer ses efforts sur la source, la famille, où les valeurs peuvent être enseignées, pratiquées, vécues et perpétuées. Sinon, mes frèreset sœurs, nous assisterons à des inondations encore plus graves en aval, caractérisées par une corruption destructrice et une violence sans limites (voir Genèse 6:11, 12. Voir aussi Matthieu 24:37).
Si les facteurs de pluie demeurent, la pluie continuera de tomber et les inondations continueront de se produire. Les digues et les sacs de sable en aval ne pourront rien contre la montée des eaux. Davantage de familles et même de nations si elles sont fondées sur le sable du siècle et non sur le granite de l’Evangile souffriront. Si le nombre de familles en mauvais état augmente, leurs enfants en situation d’échec se répandront dans des écoles et des rues déjà mal en point. Ce n’est pas une jolie scène, même maintenant.
Les nations dans lesquels l’idéalisme traditionnel cède la place au cynisme moderne perdront les bénédictions du ciel dont elles ont un si urgent besoin, et elles perdront aussi leur légitimité aux yeux de leurs citoyens.
Dans la confusion des solutions proposées par tant de voix dans le monde, nous avons à notre disposition une perspective qui peut nous sauver et nous racheter (voir 1 Corinthiens 14:10. Voir aussi Jean 10:27). Elle demande que nous apprenions qui est le Christ, comment il a vécu, et pourquoi il est mort. Après tout, c’est lui qui nous a donné une large perspective concernant la famille.
A l’approche de la fin de ces fêtes de Pâques, combien il est approprié de méditer sur le sacrifice expiatoire de Jésus, courbé à Gethsémané. Par son sang versé, il a transformé la mort. Jusqu’à Gethsémané et jusqu’au Calvaire, la mort était un point final inflexible! Jésus a plié la mort et en a fait une simple virgule!
Loué soit Jésus pour avoir porté les péchés et les souffrances de toute «la famille d’Adam» (2 Néphi 9:21; 2:20). Efforçons-nous à présent de prendre un soin spécial de notre famille, comme Jésus a pris soin de la sienne, de «la famille de toute la terre» (2 Néphi 2:20). Au nom de Jésus-Christ. Amen! 9