Un seau par personne
Le 12 juillet 2004, je me suis réveillé vers 5 heures 20 et j’ai regardé comme d’habitude par la fenêtre. Le garde qui se trouvait au portail de notre propriété était tout à fait réveillé. Une femme agitait les doigts devant son visage et vingt-cinq autres femmes se tenaient contre la grille d’enceinte, portant chacune un ou plusieurs seaux ou bassines vides. Je me suis dépêché de m’habiller et je suis sorti.
L’eau avait été coupée la veille à Tema, ville de 100 000 habitants, et sur des kilomètres alentour. Plus personne n’avait d’eau depuis environ 24 heures, et la panique commençait à s’installer. Nous n’avions pas remarqué le problème parce que le Centre de formation des missionnaires du Ghana, dont j’étais président, possède un grand réservoir d’eau où nous pouvions pomper chaque fois que nous en avions besoin. Aucune eau fraîche ne s’y ajoutait, mais nous vivions sur notre réserve.
Je ne sais pas pourquoi, mais il y avait encore un peu d’eau au robinet extérieur de notre église (dans la même propriété gardée), et quelqu’un avait répandu le bruit que les mormons avaient de l’eau. Des gens arrivaient de partout avec des seaux pour en avoir. Le concierge était arrivé avant moi à l’église et voulait empêcher les gens d’approcher. Il était sûr qu’avant très peu de temps nous n’aurions plus d’eau non plus.
J’ai appelé le garde et le concierge. J’ai demandé au concierge ce que le Sauveur ferait. Je lui ai demandé de réfléchir aux bonnes et aux mauvaises conséquences de notre décision. Je lui ai dit qu’il était fort possible que l’eau de notre robinet s’arrête, mais qu’il serait préférable que ce soit le seau d’un voisin qui en recueille la dernière goutte. Il a été d’accord, nous avons ouvert la grille et nous avons essayé d’installer un peu d’ordre dans la foule sans cesse grandissante des gens qui arrivaient en courant. Nous avons supplié les gens de se limiter à «un seau par personne». Il était alors environ 6 heures 15. La queue était longue et il y avait peu de pression mais le robinet continuait de couler.
Nous pensions que l’eau allait s’arrêter. Nulle part ailleurs en ville il y avait de l’eau. Tout le monde se joignait à nous en prière et demandait à notre Père céleste de laisser ce robinet continuer de couler pour ces gens assoiffés. L’eau ne s’est pas arrêtée. Et les gens étaient très reconnaissants.
Une autre chose merveilleuse s’est produite durant ce moment critique. Nous avons vérifié le réservoir du Centre de formation des missionnaires, et il n’était plus qu’à moitié plein. Nous ne voulions pas ébruiter que nous avions cette eau parce que nous pensions que nous pourrions la garder pour de réelles urgences si la coupure durait plusieurs jours. Mais un camion chargé de plusieurs grands tonneaux s’est arrêté dans la propriété. Il venait de l’hôpital général de Tema. Cet hôpital avait aussi un grand réservoir pour les situations d’urgence, mais il était déjà vide, et il y avait des patients assoiffés. Nous avons donc laissé le camion reculer jusqu’au réservoir du Centre de formation des missionnaires et ces gens ont rempli leurs tonneaux grâce à notre réserve. Nous leur avons dit de revenir en chercher si nécessaire, que nous partagerions tant que nous en aurions. Ils étaient reconnaissants.
Vers 15 heures ce jour-là, l’eau a été rétablie dans la ville, et les gens qui faisaient la queue sont repartis chez eux en courant avec leurs seaux vides. Mais les bons sentiments subsistent.