L’espérance parfaite
Dans la géométrie de la théologie, l’espérance a un rayon supérieur à celui de la foi. Si la foi s’accroît, le périmètre de l’espérance s’étend proportionnellement.
Tout comme j’ai levé la main ce matin, j’élève la voix avec plaisir cet après-midi pour soutenir le président Hunter. C’est un homme humble et bien particulier. Et comme nous avons entendu le témoignage de deux nouveaux apôtres que nous avons soutenus ce matin, j’élève ma voix en soutien cet après-midi. Je me réjouis des deux remarquables nouveaux soixante-dix et des nouvelles sœurs dirigeantes.
Depuis quelque temps il y a un sentiment croissant et profond de désespoir existentiel dans le monde. Ce désespoir lié à la condition mortelle reflète et touche une grande partie de l’humanité. Les guerres, tribales ou nationales, «ont accompagné toute l’histoire de l’homme du vingtième siècle» (Paul Fussell, The Great War and Modern Memory, Londres, Oxford University Press, 1975, p.74). Un cynisme amer caractérise la politique dans de nombreuses régions du monde. Les génocides, la famine, les épidémies et les exodes de réfugiés ont profondément sapé l’espérance de l’homme, en grande partie du fait de catastrophes provoquées par l’homme et qui auraient pu être évitées. Les dommages peuvent être imputés à une forme ou à une autre d’iniquité, et le désespoir naît de l’iniquité! (Moroni 10:22).
Bien entendu, beaucoup de gens ne sont pas d’accord sur ce qui constitue le péché, mais ils ne se réjouissent certainement pas de l’agravation du désespoir de l’homme! De même, certains progressistes ne se lamentent pas non plus sur la perte de la foi traditionnelle, mais ils se lamentent sûrement sur la diminution continuelle de l’espérance et de la charité qui ont toujours été rares.
L’espérance est-elle quelque choses d’important, ou n’est-ce qu’une vertu dépassée?
Sans l’espérance, quel avenir a le pardon avec son influence réconciliatrice sur la famille humaine? Sans l’espérance, pourquoi se passer de biens matériels maintenant pour préserver des ressources précieuses pour les générations à venir? Sans espérance, qu’est-ce qui empêchera ce qui reste d’idéalisme de sombrer dans le cynisme et de détruire les gouvernements et les familles, institutions déjà en grand danger?
Une combinaison de conséquences commence à apparaître. Comme cela a été prophétisé, la charité du plus grand nombre se refroidit (Matthieu 24:12). Même ceux qui sont en sécurité dans l’amour qu’ils éprouvent ressentent le froid environnant. La perte de l’espérance alimente l’égoïsme, car beaucoup de gens se consacrent avec plus d’intensité encore à la satisfaction de leurs désirs. Avec la diminution de la conscience du péché, diminue le sentiment de honte, aiguillon brûlant nécessaire au repentir. La honte a souvent fait place à l’arrogance chez les gens dénués de sens moral, y compris chez les célébrités bouffies d’orgueil dont la hardiesse affichée cache la vacuité. Henry Thoreau a fait remarquer à juste titre qu’il y a un désespoir inconscient qui se cache jusque sous ce que l’on appelle les jeux et les distractions des humains.» (Henry David Thoreau, Walden, chaper 1, p. 8). Il n’est pas étonnant que tant de rires creux s’élèvent de la «foule solitaire».
Les sociétés considèrent les valeurs traditionnelles comme étant sans importance, et nous voyons défiler un cortège de tristes conséquences. Nous nous angoissons, par exemple, en pensant à ce qui arrive, entre autres, à ceux qui ne sont pas nés, qui ne peuvent pas voter, aux enfants qui sont en danger. Nous pleurons sur les enfants qui ont des enfants et sur les enfants qui tirent sur des enfants. Souvent les solutions temporelles aux problèmes ne sont pas basées sur des principes spirituels. Pour reprendre une métaphore, ces remèdes font souvent penser à un passager alarmé qui, s’apercevant qu’il s’est trompé de train, essaie de compenser la marche du train en courant dans le couloir dans la direction opposée!
Seule l’acceptation des révélations de Dieu peut fournir direction et correction et, ainsi, produire une «parfaite espérance» (2 Néphi 31:20). La véritable espérance ne devient éternelle que si elle est reliée aux choses éternelles!
«Et qu’allez-vous espérer?» écrit Moroni. «Voici, je vous dis que vous aurez l’espérance par l’expiation du Christ» (Moroni 7:41; voir aussi Alma 27:28). Tant d’espérances moindres reposent sur cet acte triomphal, qui aura pour résultat la résurrection finale de tout le genre humain!
Les prophètes ont toujours eu et ont toujours enseigné l’espérance suprême dans le Christ. Jacob a écrit: «Nous avons eu connaissance du Christ, … nous avons espéré sa gloire de nombreuses centaines d’années avant sa venue; … aussi tous les saints prophètes qui étaient avant nous» (Jacob 4:4).
Nous pouvons être rassurés encore et encore à propos de cette grande espérance par le Consolateur qui nous enseigne la vérité sur «les choses telles qu’elles sont, telles qu’elles ont été et telles qu’elles seront» (Moroni 8:26; Jacob 4:13). Cette espérance constitue «une ancre» pour l’âme. Cette espérance est conservée grâce à la foi au Christ. (Alma 25:16; Ether 12:9). Au contraire, une vision de la vie dépourvue de croyance en la résurrection ne produit qu’une espérance à court terme (voir 1 Cor. 15:19).
Le fait de posséder l’espérance suprême ne signifie pas que les problèmes immédiats nous seront épargnés, mais la mort éternelle nous sera épargnée. En attendant, cette espérance nous permet de prononcer le mot employé il y a des siècles par trois hommes vaillants. Ils savaient que Dieu avait le pouvoir de les sauver de la fournaise ardente, s’il le décidait. «Sinon», dirent-ils ils le serviraient tout de même! (Dn 3:18).
Il n’est pas étonnant que le trio constitué de la foi, de l’espérance et de la charité, qui nous amène au Christ, soit étroitement lié à la même chose: la foi est la foi au Seigneur Jésus-Christ, l’espérance est l’espérance en son expiation et la charité est l’amour pur du Christ! (Moroni 7:47). Chacun de ces attributs nous qualifie pour le royaume céleste (voir Moroni 10:20-21; Ether 12:34). Chacun, premièrement, exige de nous que nous soyons doux et humbles. (Moroni 7:39, 43).
La foi et l’espérance sont en interraction constante, et ne peuvent pas toujours être distinguées ni placées par ordre d’apparition. Bien que la foi ne soit pas non plus une connaissance parfaite, les attentes vivifiées qu’elle engendre sont absolument vraies (Ether 12:4; Romains 8:24; Hébreux 11:1; Alma 32:21). Dans la géométrie de la théologie, l’espérance a un rayon supérieur à celui de la foi. Si la foi s’accroît, le périmètre de l’espérance s’étend proportionnellement.
La foi, l’espérance et la charité vont ensemble, de même que le doute, le désespoir et l’insensibilisation. La foi doit être constamment et soigneusement nourrie, alors que le désespoir, comme les mauvaises herbes, a besoin de peu d’encouragement pour pousser et s’étendre. Le désespoir se manifeste tout naturellement chez l’homme naturel!
L’âme peut être éveillée et mobilisée par l’appel de l’espérance mieux que par toute autre musique. Même si des camarades s’assoupissent ou désertent, l’espérance vive agit comme un éclaireur en reconnaissance qui précède les colonnes de Dieu et leur fait signe d’avancer. «L’espérance luit devant nous» (voir 1 Pierre 1:3). L’espérance a poussé les disciples à se rendre rapidement et à l’improviste à un sépulcre vide (Marc 16:1-8; Luc 24:8-12). L’espérance a aidé un prophète à voir la pluie secourable dans un nuage lointain qui ne semblait pas plus grand qu’une main d’homme (1 Rois 18:41-45).
Il est remarquable que ceux qui espèrent en l’au-delà et en un monde meilleur travaillent généralement avec zèle à améliorer celui-ci, car ils abondent en bonnes œuvres (D&A 58:27; Alma 7:24). Ainsi, la véritable espérance est beaucoup plus qu’une vague rêverie. Loin d’amollir, elle endurcit la moelle spirituelle. Elle est mesurée, pas étourdie, fervente sans être naïve et ferme sans être arrogante. L’espérance est une anticipation réaliste qui prend la forme d’une détermination, non seulement à survivre, mais «à bien endurer» jusqu’à la fin (D&A 121:8).
Une espérance faible nous laisse à la merci de nos humeurs et des événements, mais l’«espérance parfaite» illumine les gens. Leur luminosité se voit et permet aussi de voir les choses! Cette espérance nous permet d’aller de l’avant même quand des nuages sombres nous oppressent (Hébreux 6:19; Ether 12:4; Colossiens 1:23; voir 2 Néphi 31:16, 20). Parfois, au plus profond de l’obscurité, il n’y a pas de lumière extérieure, uniquement une lumière intérieure pour nous guider et nous rassurer.
Bien que nous soyons «ancrés» à une grande et suprême espérance, certaines de nos espérances tactiques sont d’une autre nature. Nous pouvons espérer une augmentation de salaire, un rendez-vous avec une personne spéciale, une victoire électorale, ou bien une plus grande maison, des choses qui peuvent se réaliser ou non. La foi dans le plan du Père nous donne de l’endurance, même au milieu de la déroute de ces espoirs à court terme. L’espérance nous garde «engagés avec zèle» dans de bonnes causes quand, pour l’instant, elles semblent être des causes perdues (voir D&A 58:27).
L’espérance nous aide à marcher selon la foi, non par la vue. Cela peut être en fait plus sûr. Quand il n’est pas aidé par l’Esprit, l’homme naturel craint de contempler les situations difficiles. (2 Co 5:7). Il est immobilisé devant les incertitudes. Broyé par ses humeurs et intimidé par ses peurs, l’homme naturel réagit avec excès aux déceptions du jour, alors que l’espérance les survole.
L’espérance est particulièrement nécessaire dans la luttre âpre requise pour se dépouiller de l’homme naturel (voir Mosiah 3:19). Renoncer à rechercher Dieu et à s’améliorer, c’est s’abandonner du même coup à l’homme naturel.
L’espérance quotidienne est indispensable, car nos épreuves semblent durer longtemps avant que nous parvenions à la terre promise. Un trajet ardu nous attend, mais l’espérance pousse les disciples fatigués à poursuivre leur route.
Ceux qui sont animés de véritable espérance voient souvent leur situation bouleversée sans arrêt, comme un kaléidoscope. Mais, avec l’oeil de la foi, ils continuent de percevoir le dessein divin (Alma 5:15).
Dans notre marche en avant, nous pouvons repartir du point où nous sommes parvenus hier et puiser ainsi de l’espérance de nos expériences. C’est pourquoi Paul a expliqué que l’affliction produit la persévérance, la persévérance l’expérience, et l’expérience l’espérance (Romains 5: 3, 4). C’est pourquoi nous chantons: «Nous l’avons éprouvé par le passé.»
L’espérance se nourrit des paroles du Christ, «écrites pour notre édification, de sorte qu’ayant tous ces témoignages par le réconfort des Ecritures, nous ayons l’espérance (Rm 15:4; Jacob 4:6; voir aussi 2 Né 31:20). Nous chantons également qu’un surcroît de sainteté signifie un surcroît d’espérance en sa parole» (Cantiques, n° 70).
Nous avons grand besoin de véritable espérance afin d’être plus aimants, car la charité de beaucoup se refroidit; d’être plus miséricordieux quand nous sommes incompris ou diffamés; plus saints, car le monde mûrit dans l’iniquité; plus courtois et patients dans un monde qui devient plus grossier et plus dur, et plus remplis d’espérance sincère, quand le cœur des autres hommes leur manque. Quel que soit le sillon où nous travaillons, nous devons «labourer avec espérance», sans regarder en arrière ni permettre au passé de grever l’avenir. (1 Co 9:10).
L’espérance peut être contagieuse; nous devons donc toujours être prêts à nous défendre devant quiconque nous demande raison de l’espérance qui est en nous (1 Pierre 3:15). Frère Brigham a dit que si nous ne faisons pas part de notre connaissance aux autres et ne faisons pas le bien, nous nous bloquerons dans nos points de vue et nos sentiments (Journal of Discourses, 2:267) Le désespoir est un blocage complet.
L’espérance véritable donne du courage spirituel, même aux parents méritants, éreintés à force d’engagement et de zèle. Tout comme la tour penchée de Pise est une réfutation permanente du pessimisme architectural, de même l’espérance des parents, qui refusent de s’écrouler devant la gravité de la situation actuelle de la famille, est une réfutation du désespoir. Les parents qui savent donner n’abandonnent jamais l’espérance!
L’espérance, bien que vive par ailleurs, nous assiste paisiblement aux obsèques. Nos larmes sont tout aussi abondantes, mais pas de désespoir. Non, ce sont des larmes d’appréciation suscitée par le bouleversement de la séparation. Elles deviendront bientôt des larmes d’attente et de joie. Cependant le vide est si réel et si actif qu’il provoque un inventaire rétroactif de ce qui nous manque tant à présent, tout en nous annonçant de magnifiques retrouvailles.
L’espérance humble nous aide à nous améliorer en nous permettant d’être suffisamment humbles pour demander: «Est-ce moi, Seigneur?» (Mt 26:26). L’espérance soumise nous prépare à abandonner tous nos péchés, parce que nous sommes parvenus à connaître Jésus, qui, seul, peut s’en charger! (Mt 26:22; Alma 22:18).
L’espérance de l’Evangile nous empêche de devenir un optimiste à tout crin ou un sombre pessimiste. Les voix d’avertissement sont faites pour être entendues, pas seulement pour être élevées.
Ayant la bénédiction d’avoir l’espérance, nous, disciples, tournons-nous vers tous ceux qui, pour une raison ou une autre, «se sont détournés de l’espérance de l’Evangile» (Colossiens 1:23). Soyons prêts à relever les bras qui tombent désespérément. (Colossiens 1:23).
L’espérance nous appelle tous à rentrer au foyer où une lueur reflète la Lumière du monde dont l’éclat et la gloire défient toute description (JSH, v. 17). Jésus attend, les bras ouverts pour accueillir ceux qui enfin vaincront par la foi et l’espérance (Mormon 6:17). Pour nous accueillir, il ne nous donnera pas simplement une brève tape sur l’épaule, mais il nous serrera dans ses bras (Mormon 5:11)
Les enfants de la Primaire chanteront bientôt combien ils souhaiteraient que Jésus les tienne dans ses bras. Nous pouvons, eux et nous, avoir l’espérance et même la connaissance de ces choses sacrées! (Alma 28:12).
Au nom de Jésus-Christ. Amen.