«Tenez-vous en des ⌦lieux saints»
Le temple est la clef du salut … un lieu d’actions de grâce, un lieu d’instruction et un lieu de compréhension.
Je n’oublierai jamais une nuit, il y a près de trente ans. Ma femme, Patricia, et moi étions mariés depuis deux ans. Nous vivions dans un petit duplex, sur la rive nord d’Oahu. J’étais officier d’infanterie, commandant d’une unité stationnée à la caserne de Schofield, à Hawaï. Notre brigade avait reçu l’ordre de se battre au Viet-Nam. L’avion devait partir après minuit, et un ami saint des derniers jours avait accepté de me conduire à l’aéroport à onze heures du soir.
Toute cette longue soirée, Pat et moi sommes restés sur le divan de notre minuscule salon, les doigts entrelacés, à regarder les aiguilles de l’horloge approcher de l’heure fatidique et à écouter le bruit doux des vagues sur la grève. Le tic tac de l’horloge semblait un métronome de la condition mortelle, contraste douloureux avec le flux étouffé de la mer éternelle. L’heure du départ est arrivée. Dans l’encadrement de la porte, j’ai serré ma femme dans mes bras, je l’ai embrassée une dernière fois et je suis parti. En fermant la porte, je me suis demandé si c’était la dernière fois de cette vie que je voyais mon épouse. La nuit était bien sombre.
Mon ami et moi avons roulé en silence dans la nuit entre les champs de canne à sucre et d’ananas d’Oahu. J’avais le cœur brisé. Puis, comme nous passions à hauteur de Schofield, une unité d’infanterie a lancé une fusée éclairante. Elle a illuminé quelques instants l’obscurité de la nuit et a comme allumé une flamme spirituelle dans les ténèbres qui avaient envahi mon âme. Mes pensées se sont tournées de ce jour de grande tristesse vers des jours plus heureux: à ce beau jour de décembre où Pat et moi étions entrés dans le saint temple et où nous avions été scellés l’un à l’autre, non seulement pour cette vie mais pour l’éternité. J’ai pensé aux alliances éternelles que nous avions contractées. Comme si le soleil se levait, je me suis rendu compte tout à coup que, quoi qu’il arrive dans l’avenir immédiat incertain, Pat serait toujours mienne. Quand je suis arrivé à l’aéroport, j’ai téléphoné à Pat. Animés par un espoir nouveau et par la paix née de la foi et de la compréhension, nous avons parlé et ri doucement avant de nous dire de nouveau au revoir. Il n’était que minuit, mais le soleil se levait déjà.
Un autre jour, dans un autre lieu, le soleil se couchait sur le ministère du Messie dans la condition mortelle, au moment où il quittait le temple de Jérusalem pour la dernière fois. Montant le mont des Oliviers avec ses disciples, le Sauveur prophétisa les événements violents qui précéderaient la destruction de Jérusalem et sa seconde venue. Il adressa ensuite cette importante exhortation à ses disciples, anciens et modernes: «Alors vous vous tiendrez dans le lieu saint; que celui qui lit comprenne» (Joseph Smith, Matthieu 1:12; voir aussi Matthieu 24:15). Les révélations des derniers jours apportent un éclaircissement. Elles enseignent qu’à notre époque, parmi les conflits, les catastrophes et les épidémies, il y a deux royaumes engagés dans une lutte âpre pour l’âme des hommes, Sion et Babylone. Elles répètent plus d’une fois l’injonction de «se tenir dans des lieux saints» pour être à l’abri de ces tempêtes de la vie des derniers jours (voir D&A 45:32; 87:8; 101:16-23). Le plus important de ces «lieux saints» est le temple du Seigneur, qui est la clef de tous les autres.
Les mots Sion et temple sont étroitement liés. En août 1833, quand les saints essayèrent contre de grandes persécutions d’établir Sion géographiquement dans le comté de Jackson, au Missouri, il fut recommandé à Joseph Smith, le prophète, dans une révélation, de bâtir une maison au Seigneur «pour le salut de Sion» (D&A 97:12). Le temple est la clef du salut parce que c’est un lieu d’actions de grâce, un lieu d’instruction et un lieu de compréhension de toutes choses (voir D&A 97:12-14). Suit alors cette magnifique promesse: «Oui, et ma présence y sera, car j’y viendrai, et tous ceux qui ont le cœur pur qui y viendront verront Dieu … C’est pourquoi … que Sion se réjouisse car c’est là Sion: Ceux qui ont le cœur pur; c’est pourquoi que Sion se réjouisse tandis que tous les méchants se lamenteront» (D&A 97:16, 21). Pour Sion, ceux qui ont le cœur pur, le temple détient les clefs qui ouvrent «les lieux saints», lieux de joie, tandis que ceux qui suivent les voies de Babylone sont condamnés à se lamenter.
Je devais faire mes adieux à ma femme deux fois encore pendant les années tumultueuses de la guerre du Viet-Nam. Quelques années plus tard, nous allions nous dire adieu alors que notre fils de cinq ans venait de mourir; plus tard, encore, allait naître une fille handicapée. La vie nous a apporté, comme à chacun, ses difficultés. Mais au fils des années, j’ai appris à apprécier la sagesse et la perspective d’un ami, patriarche et scelleur au temple. Il me disait: «Lance, la joie que je reçois n’est pas uniquement d’aller au temple. Le temple est en moi! Et quand je sors du temple, sa paix m’accompagne.»
Il peut en être ainsi pour chaque âme juste. Si nous allons au temple aussi souvent que la distance et notre situation personnelle le permettent, le temple sera en nous. Alors, malgré les difficultés de la vie, nous serons toujours dans un lieu saint. La maison du Seigneur appelle tous ceux d’entre nous qui veulent être comptés parmi Sion: «Venez, et montons à la montagne de l’Eternel, à la maison du Dieu de Jacob, afin qu’il nous enseigne ses voies, et que nous marchions dans ses sentiers» (Esaïe 2:3).
Le jour de la consécration du temple de San Diego, à laquelle notre pieu assistait, je suis entré dans la salle céleste un peu plus tôt, accompagné de ma fille et de l’un de mes fils. Ma femme dirigeait le chœur. On aurait dit que des anges s’étaient joints à eux. Ils répétaient un cantique de l’Eglise connu aux paroles magnifiques, inspirées d’Esaïe:
«Tout au sommet des monts se déploie un drapeau.
Il est aux nations donné comme un flambeau.
C’est en Sion, cité de Dieu,
Voyez, qu’il flotte dans les cieux!»
Le regard de ma femme a croisé le mien. Pendant un bref instant, j’ai été ramené des années en arrière, par-delà les difficultés et les chagrins, à ce jour merveilleux où nous sommes entrés dans la maison du Seigneur. J’ai fait approcher mes enfants. A ce moment-là, un magnifique sentiment céleste m’a rempli le cœur. J’ai su j’étais en un lieu saint. J’ai ressenti une paix comme celle que j’avais ressentie par une nuit sombre il y a tant d’années, et je me suis réjoui de nouveau. Au nom de Jésus-Christ, amen.